Des affrontements entre les jeunes Hema et Lendu dans la province de l’Ituri, au nord-est de la République Démocratique du Congo, ont éclaté en décembre 2017 et ont dégénérés en attaques au coup-pour-coup qui se sont rapidement propagées dans toute la province. « Plus de 70 villages ont été détruits et environ 350 000 personnes ont cherché refuge en Ouganda voisin ou ont été déplacées à l’intérieur du pays » écrit une étude du centre d’étude stratégique de l’Afrique.
Cette étude consultée par POLITICO.CD relève qu’en juillet 2018, le Haut Commissariat des Nations Unies pour les réfugiés (HCR)a déclaré que ses équipes avaient reçu des informations faisant état de groupes armés commettant des massacres et rasant des villages entiers.
« Le retour de la crise en Ituri est particulièrement alarmant car pendant la deuxième guerre du Congo (1998–2003), la province a été l’épicentre des combats les plus meurtriers du pays, tuant environ 50 000 civils et déplaçant plus de 500 000 civils » lit-on dans ce document rédigés par deux experts de ce centre ( Paul Nantulya, associé de recherche et Dorina Bekoe, professeure associée, spécialisée dans la prévention, l’atténuation et la résolution des conflits).
Bien que les origines des derniers combats ne soient pas claires, les tendances sont similaires à celles observées précédemment. Ce qui signifie que les causes profondes n’ont jamais été traitées. Celles‑ci incluent l’instrumentalisation des identités ethniques par ceux qui arment les milices Hema et Lendu, l‘éviction forcée avec un ciblage délibéré des civils selon des critères ethniques par ces milices de zones riches en minéraux » souligne l’étude.
Comment l’ethnicité est instrumentalisée
Les plaines de l’Ituri, riches en pétrole, en bois, en or, en diamants et en coltan, ont été le théâtre de contestations de longue date entre les pasteurs hema et les agriculteurs lendu. La population lendu représente entre 750 000 et 1 million d’habitants, l’agriculture étant leur activité économique traditionnelle. Les Hema, qui comptent entre 300 000 et 400 000 personnes, contrôlent la plupart des plantations et des ranchs laissés par les colons belges. Au fil du temps, ils ont étendu leurs propriétés foncières, leur pâturage et leur élevage à grande échelle à Djugu au Nord, à Irumu au Sud et le long du lac Albert à l’Est, grâce au soutien des autorités locales et nationales. La demande d’un plus grand accès à la terre pour l’élevage et l’agriculture, la croissance rapide de la population et la diminution de la fertilité et de la disponibilité des terres ont été au centre des tensions entre les deux communautés.
L’intérêt international pour le soutien du cadre de l’Ituri ayant diminué, en partie parce que la violence avait diminué, les politiciens locaux et nationaux ont recommencé à s’imposer. En conséquence, les armes ont recommencé à affluer dans la région, car ces élites cherchaient à créer et à financer des milices pour exploiter les ressources de la région » écrit le document.
Alors que le refus de Kabila de respecter la limite de mandats présidentiels suscitait colère et incertitude, certains de ces groupes, comme le Front intégrationniste nationaliste dominé par les Lendu, ont lancé des attaques meurtrières contre les installations gouvernementales, notamment la Commission électorale nationale, ainsi que des civils. « Étant donné que la légitimité du gouvernement central a toujours été fragile dans les régions périphériques du Congo, une solution à la dernière crise en Ituri dépendra largement des progrès réalisés dans la recherche d’un règlement au niveau national » lit-on.