Au commencement : Kamerhe, l’IGF et les 15 millions. Vital Kamerhe était sûr de son fait, sans doute qu’il avait consulté le président Félix Tshisekedi avant de se lancer. Dans une grande interview au magazine Jeune Afrique, il se lance et tente de démonter les deux polémiques qui le traque. D’abord les 15 millions. Le Directeur de cabinet du président annonce qu’ils n’ont pas disparu. Ensuite, dans son bras de fer avec les inspecteurs de l’IGF, il annonce un « complot mal monté » contre sa personne et une « rébellion » administrative. Déjà le 24 août 2019, il avait adressé une lettre, fortement démentie sur les réseaux sociaux, au ministre des Finances, mais également aux Inspecteurs de l’IGF, pour ordonner l’arrête d’une enquête qui ne serait autorisée ni par le président ni par son directeur de cabinet.
Par la suite, deux inspecteurs seront inquiétés, interpellés et, à en croire leur chef, menacés. Pour autant, au micro de la RFI, Victor Batubenga, qui affirme avoir été menacé par le Conseiller même du président Tshisekedi en matière de Sécurité, n’a visiblement pas peur. Il annonce qu’il ira jusqu’au bout, entendant le retour du Chef de l’Etat, de son déplacement au Japon, pour lui faire part de la situation.
Félix Tshisekedi n’est pas de cet avis, il veut la justice. Le Week-end dernier, l’homme a fini par rencontrer le président Félix Tshisekedi, qui l’a reçu et qui semble même contredire son Chef de cabinet. Car si Vital Kamerhe affirme que l’inspecteur est en rébellion administrative, le président Tshisekedi lui apporte par contre son soutien, et l’encourage même à continuer ses investigations. De l’autre côté, dans l’affaire des 15 millions, le Président se dit « non concerné ». Tout en « gardant sa confiance » au Directeur de cabinet, il appelle cependant la justice à « faire son travail ».
La position prudente du Chef de l’Etat congolais est à comprendre à allant à la genèse même de ce dossier. En effet, tout commence lorsque le numéro deux de l’Agence nationale de Renseignements, Jean-Hervé Mbelu Biosha, lance une missive le 16 août dernier à l’Inspection générale des Finances pour lancer un audit des dépenses publiques depuis l’arrivée du président Félix Tshisekedi au pouvoir. Une réaction en chaîne s’en suit, et trouve par ailleurs un rapport de la même IGF déjà rédigé et touchant, une fois de plus Vital Kamerhe. Si Kamerhe s’oppose aux enquêtes publiquement en citant le nom du Chef de l’Etat dans sa lettre du 24 août adressée au Ministre des Finances et à l’IGF, il semble clairement que le Président congolais ne soit pas de cet avis. Lui qui, à la suite de sa sortie notamment ce week-end à la presse belge, veut privilégier les enquêtes, allant jusqu’à saluer même le travail initier par l’ANR.
Mais alors, pourquoi Kamerhe s’agite ? Tout remonte encore à novembre 2017. Dans un revirement spectaculaire, l’ancien maître à jouer de Joseph Kabila, devenu longtemps opposant, opère un choix qui changera à jamais l’avenir politique de la RDC. Mystifié à Genève par la clique de Fayulu et Bemba, il fait pourtant alliance avec Félix Tshisekedi qu’il affrontait jadis. A Nairobi, un des duos les plus improbables prend forme pour une course électorale inédite. Si, officiellement, toutes les composantes entre l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS) de Félix Tshisekedi, et l’Union pour la Nation Congolaise (UNC) de Kamerhe semblent s’accorder et faire union, toujours est-il que les deux forces, qui se sont tant affrontées, n’ont pour autant pas oublier les blessures du passé.
C’est dans cette configuration que Vital Kamerhe est projeté au Palais de la nation, comme gardien du pouvoir de Félix Tshisekedi dès le 25 janvier 2019. Au coeur du cabinet du nouveau Chef de l’Etat congolais, il va devoir co-habiter avec ceux qui n’ont pas oublié les rancœurs du passé et ceux qui doivent profiter de ce pouvoir inattendu. Les premières difficultés ne trainent pas. Le Directeur de cabinet a du mal à se faire aimer d’une aile dure de Limete, qui voit en lui, un homme qui « profite un peu trop » des retrombées de son alliance.
De son côté, Kamerhe et ses proches trouvent qu’ils sont à peine remerciés de leur soutien, alors que l’ancien président de l’Assemblée nationale a tout de même abandonné son rêve de finir à la Primature. Félix Tshisekedi tentera en vain de résoudre la crise. Le Président a plusieurs fois demandé à Vital Kamerhe d’entrer au gouvernement. Mais ce dernier a refusé. Son camp vit les demandes du président comme une « tentative de se débarrasser de lui ».
Il y a également ceux du FCC. Joseph Kabila n’a, tout au long de son pouvoir, pas pardonné à Kamerhe son départ fracassant en 2009 pour l’opposition. Les épisode du Dialogue de la Cité de l’Union Africaine l’attestent. Et donc, Kamerhe éclaboussé, nul ne pourrait réellement s’en émouvoir.
Par ailleurs, Vital Kamerhe a lui-même commis plusieurs pêchés. Sa demande au Comité de produits pétroliers de virer l’argent vers un compte, semble-t-il celui du programme de 100 jours était une violation pure et simple de la loi. Il y a également des déclarations contradictoires, affirmant tantôt qu’il n’est pas cité dans ce rapport de l’IGF sur les produits prétroliers, tantôt que le président est « de son avis » contre les enquêtes de l’IGF n’ont fait que renforcer des soupçons sur sa personne.
L’affaire des 15 millions est désormais entre les mains de la justice. L’opinion prendra son mal en patience. Mais Félix Tshisekedi a publiquement annoncé son soutien tant à cette initiative, qu’aux enquêtes de l’IGF. Les jours qui suivent pourront alors éclairer l’opinion. Mais il est clair que la FATSHIVIT prend du plomb dans l’aile, sous le regard très intéressé du FCC.
LITSANI CHOUKRAN.
3 commentaires
7 mois seulement du pouvoir et les premiers couacs surgissent. Un président qui n’a pas été élu « convenablement » ne devrait que rencontrer des problèmes tout au long de son mandat. Dieu sait combient il y aura encore des couacs d’ici fin mandat.
Attention!!!!
L’une des forces de Vital Kamerhe est sa très grande capacité à renaître ou ressusciter. Aussi en s’appuyant à la justice le Président a beaucoup aidé son Dircab car en réalité la justice fait peur à tout le monde; aux gouvernants tout comme aux gouvernés. Le récent communiqué du procureur de la République faisant foi. En effet, la presse, les politiciens sénateurs vont après ce communiqué tempérer leurs ardeurs. Voyons voir.
J’ai voulu écrire…politiciens et débatteurs…