Septembre 2016. Contre toute attente, et alors que l’opposition refuse tout dialogue avec Joseph Kabila, un homme prend les devants de la scène et s’assume. « J’étais contre cette idée, je l’avais même fait savoir au Président. Je ne voulais pas du dialogue avec Kabila », expliquera plus tard Billy Kambale, l’actuel ministre de la Jeunesse. Mais Vital Kamerhe, lui, ose en tout cas se lancer. Il y perdra des plumes. Le grand Rassemblement, emmené par Etienne Tshisekedi himself, met sa tête à prix. La nation lui en veut. Lui qui donne des « béquilles » à un Kabila dos au mur. Ses proches le quittent pour rejoindre Moïse Katumbi, à coup de négoces. Et lorsque Samy Badibanga est nommé Premier ministre, l’Union pour la Nation Congolaise (UNC) est terrassée.
Mamy Kanku, sa présidente de la Ligue des femmes, claque la porte pour Kabila, affirmant ne plus « avoir les mêmes convictions que Kemerhe ». Jean-Baudouin Mayo, son Secrétaire général, qui vient de remplacer la doublette Ewanga-Lubaya partie rejoindre Katumbi, menace de partir. Aux côtés de cet ancien président de l’Assemblée nationale, il ne reste plus que des jeunes cadres comme Molendo Sakombi, l’étoile montante ou le fougueux Kambale.
Il voit toujours juste
Mais le temps donnera raison à Kamerhe, au point de prouver une réalité irréfutable : l’homme est souvent jugé à tort. Car à peine un mois après le dialogue de la cité de l’Union Africaine, Etienne Tshisekedi et ses alliés, qui fustigeaient pourtant Kamerhe pour avoir accepté de dialoguer, se mettent finalement autour d’une table avec Kabila ; pour des résultats que nul au Congo n’ignore.
Kamerhe a également une longueur d’avance. Son destin bascule une nouvelle fois en novembre 2018, un an jour pour jour après les épisodes du dialogue. Dupé à Genève par la malice de Katumbi et de ses alliés Bemba, Muzito et Fayulu ; Vital Kamerhe fait parler son sens de lecture politique et de pragmatisme, allant aborder son « jeune-frère » Félix Tshisekedi, pour finir par créer ensemble la coalition inédite du Cap pour le Changement (CACH).
Comme il en avait fait de Kabila, Kamerhe se lance dans une bataille électorale inarrêtable aux côtés de Félix Tshisekedi. Le duo FATSHIVIT est irrésistible, nul ne l’arrête, il finit par l’emporter à la Présidentielle. Et même si tout ne se passe pas comme souhaité, car s’il avait signé pour la Primature en cas d’une victoire de Félix Tshisekedi ; Vital Kamerhe se contentera du cabinet présidentiel.
Seul face aux scandales
Depuis le Palais de nation, l’allié principal du Président veille sur tout, et garde soigneusement Félix Tshisekedi loin de l’emprise du pouvoir débutant, mais sert également de bouclier, et même de tête de turc, tant face aux scandales qui pleuvent que face aux zones d’influence autour du nouveau Chef de l’Etat : entre l’UDPS gangrenée par des clivages, et un FCC qui veut tout le pouvoir, c’est sur cet as de la politique congolaise que Tshisekedi s’appuie pour défaire les pièges.
Mais tout ne se passe pas comme prévu. Kamerhe, dont le défaut naturel est précipitation, se retrouve au coeur de scandales. D’abord la fameuse affaire de 15 millions de dollars, où il est étrangement cité, alors qu’aucune preuve ne l’y lie. S’en suivra toute sorte de polémique. Des fuites très organisées des documents, bien souvent, tournant autour d’histoires d’argent. L’homme passera la moitié de l’année à payer cette polémique, dans une classe politique qui adore le détester.
Mais Tshisekedi n’en a cure. Le Chef de l’Etat n’hésite pas, quand il en a l’occasion, à réitérer son soutien à son puissant Directeur de cabinet. Le député le mieux élu du pays entend bien résister et toujours retomber sur ses pattes. Les années à venir devront composer avec lui.
3 commentaires
Je suis très ému de vos articles ça m’intéresse énormément parce que vous êtes vraiment impartial
Commenter :DU MOINS NOUS SAVONS QUE KAMERHE EST UN FAUVE QUI, UN REGARD TRÈS ATTENTIF DOIT S’OBSERVE ! SA PARTICIPATION À RWANDA AU MARIAGE DE FILS DE KABEREBE QUI A DEMEURE L’ ACTEUR PRINCIPAL DES AFRES À L ‘EST DOIT IMPÉRATIVEMENT NOUS INTERPELLÉ ! IL EST IMPORTANT DE CAPITALISER !!!
Ce style m’a totalement séduit, je l’adore bien ! C’est très intéressant.
En fait, bravo à Kamerhe d’avoir rompu l’accord de Nairobi au bénéfice de la coalition FCC-CACH, en acceptant même le cabinet présidentiel, pour la cohésion nationale. C’est sage !