Lire Acte I: Thierry Taeymans, l’homme se croyait invulnérable
Venus de Zanzibar avec les migrations arabo-indo-pakistanaises au lendemain des pogroms anti-musulmans à la suite de l’éclatement de l’empire anglais formé de l’Inde et du Pakistan, ils participent à la fondation des grandes cités commerciales dans l’actuel Maniema et le Lomami.
Les Arabo-indo-pakistanais ont été attirés au Congo par le commerce de l’ivoire et celui des Noirs. Vers 1875, l’un des co-religionnaires venu de Zanzibar, le trafiquant Tippo-Tipp au nom d’origine Hamed Ben Mohamed Ben Yuma Ben Rajab El Murjebi, crée un sultanat et fait de la cité de Kasongo une importante base militaire et commerciale. Ce très célèbre négrier arabo-africain bâtit d’autres villes dans la région : Kabambare, Nyangwe, Kisangani, Ubundu, Lomami, etc.
Mais ce potentat qui règne en maître absolu dans le Maniema et le Lualaba ne s’arrête pas en si bon chemin. Il organise des razzias des Noirs depuis le Haut Ituri à l’Est jusqu’à Lulonga à l’Ouest mais ce sultanat va être détruit par le régime colonial belge qui use de plusieurs stratagèmes.
La famille Rawji a réussi à prendre pied. Elle investit dans le secteur du petit commerce et la distribution des vivres. Elle ouvre des étals, passe le cap de l’indépendance. Celui qui franchit la porte de ses magasins n’est pas un Européen. C’est l’individu lambda à la recherche d’une boîte d’allumettes, d’un savon de Marseille, d’une tranche de morue séchée, d’une huile de palme.
Les Rawji traversent les multiples conflits qui dévastent le pays : guerres tribales, mutineries de l’armée, rébellions, pillages des commerces. Des familles européennes quittent le Congo. Si les Rawji mettent leurs arrières à l’abri, à Londres, Dubaï, Kiev, Luanda, etc., ils maintiennent une adresse sur place.
Dans une interview au Soft International parue le 29 décembre 2016, Thierry Taeymans déclarait ce qui suit : « Les Rawji ont toujours su faire fi des troubles qui ont parsemé l’histoire économique, sociale et politique du pays. Quand d’autres partaient, eux, ils renforçaient leur présence, conscients qu’un pays comme le Congo, fort d’une position centrale en Afrique et riche d’un impressionnant potentiel humain et économique, est appelé à jouer, tôt ou tard, un rôle de premier plan au cœur de l’économie mondiale » (tire de l’article : « Rawbank, une histoire »).
En clair, la recette qui a marché dans l’Allemagne d’après-guerre : ceux qui sont restés ont tout repris et ont gagné le Graal…
Si l’Est est le ventre du Congo, un centre minier qui attire, l’Ouest octroie reconnaissance.Les Rawji migrent à l’Ouest, s’installent avenue du Marché, à Léopoldville, la capitale du pays ; développent la recette miracle familiale, passent des accords de représentation des marques multinationales de produits de commerce de gros et de détail grand public d’origine asiatique et européenne.
La famille se rapproche des grands boulevards, crée en 1922 une enseigne Beltexco, dépasse ce commerce, diversifie horizontalement et verticalement son champ d’activités, rachète des empires commerciaux, industriels et médiatiques européens en faillite, érigent des immeubles, travaillent à supplanter les richissimes familles grecques, portugaises, belges, juives et rêvent de devenir les rois d’Afrique Centrale.
L’idée d’ouvrir une filière épargne et intermédiation bancaire naît dans l’un des cerveaux de la fratrie quand la troisième génération fraîche et émoulue de grandes universités occidentales et asiatiques rejoint les parents.
Comment y arriver dans cet Ouest chrétien où, à l’instar du Portugais ou du Grec, l’homme au visage couleur café fait profil bas, n’arpente pas les hauteurs de la ville outre un contexte mondial de tension sinon de guerre absolue contre le mouvement islamiste Hezbollah qualifié de groupe arabo-musulman terroriste dans tout l’Occident qui empêche l’Arabo-musulman d’aller et venir ?
La « lucarne » de Leo Tindemans est la carte à jouer pour la fratrie dans sa volonté déterminée de puissance. Elle servira à Taeymans de prendre sa revanche quand il échoue à réaliser son rêve de grandeur.