Dans la partie Est de la République Démocratique du Congo, précisément dans les provinces du Nord-Kivu, Sud-Kivu et Ituri, des messages hostiles aux humanitaires se multiplient notamment sur la toile. Ce, après la montée des tueries des civils dans ces trois provinces. À Beni, dans le Nord-Kivu, théâtre de multiples assassinats de civils, la société civile appelle à l’arrestation de tous ceux qui incitent les jeunes à s’attaquer aux humanitaires. Kizito Bin Hangi, Président de la société civile de Beni, estime que « l’État doit s’imposer et doit asseoir son autorité ».
Kizito Bin Hangi, qui précise que les manifestations sont constitutionnelles et invite la population à éviter de tomber dans les infractions individuelles, plaide pour l’arrestation de toutes les personnes considérées comme des tireurs des ficelles et qui incitent les jeunes à s’attaquer aux biens publics, aux humanitaires, agences du système des Nations unies et à la MONUSCO.
« Les manifestations publiques sont garanties dans notre Constitution. Mais, il nous revient en tant que citoyens, en tant que jeunes, de s’exprimer en restant dans le respect de la loi pour éviter de tomber dans les infractions individuelles. Mais, lorsque tout en faisant ces manifestations nous violons les droits des autres, nous commettons également des infractions et des erreurs », a-t-il déclaré le lundi 5 avril sur Radio Okapi.
« On comprend l’exaspération »
Au terme d’une mission effectuée en Ituri et à Beni au Nord Kivu, Khassim Diagne, représentant spécial adjoint du Secrétaire général de l’ONU en charge des opérations et de la protection en RDC dit être conscient des attentes de la population vis-à-vis de la MONUSCO sur la question sécuritaire.
« On comprend l’exaspération, l’impatience, l’espoir que cette population nourrit à l’endroit de la mission, de leur mission. Ça se comprend, parce que tous les jours, ils se réveillent avec des nouvelles comme quoi dans telle localité une personne a été tuée, une femme violée, un enfant kidnappé. Et je crois qu’aucun être humain, quelle que soit son appartenance politique, ethnique, culturelle, n’accepterait de voir ça. C’est vraiment une désacralisation de la condition humaine», avait-il déclaré.
Pour lutter contre ce regain de l’insécurité, Khassim Diagne plaide pour la conjugaison des forces de défense et de sécurité nationales et celles de la MONUSCO. Il précise tout de même que la MONUSCO est en RDC sur l’invitation du Gouvernement.
« Une personne tuée est une mort de plus. L’essentiel aujourd’hui est de mutualiser les forces de défense et de sécurité nationale, les forces de la MONUSCO pour poursuivre ces forces négatives, les éradiquer, les neutraliser à un point qui permette à la population de retrouver ses champs et ses activités de tous les jours », explique-t-il avant d’ajouter : « la MONUSCO est ici à l’invitation du Gouvernement congolais. Le jour évidement où cette présence n’est plus nécessaire ou n’est plus voulue, on nous le signifiera par voie officielle ».
Appel au calme
Pour sa part, le gouverneur du Nord-Kivu Carly Nzanzu Kasivita a appellé toute la population et les jeunes en particulier au calme et à la retenue. Il a également invité les mouvements citoyens « à la responsabilité » et les conseille à ne pas s’attaquer à la Communauté internationale.
« Je voudrais appeler les responsables des mouvements citoyens à la responsabilité. À défaut, ils risquent de tomber dans les infractions individuelles. Il est important en ce moment où on est attaqué de regarder dans la même direction », recadre Carly Nzanzu.
Ce Gouverneur dit, lui aussi, partager avec ces jeunes les préoccupations liées à la restauration de la paix et au développement. Il recommande de ce fait à la jeunesse de « capitaliser » sa force pour accompagner les « meilleures stratégies » pour l’instauration de la paix dans cette partie de la République.
« Nous pensons que pour autant que nous parlons le même langage sur la recherche de la paix, nous allons y arriver. Je voudrais que la jeunesse puisse capitaliser la force qu’elle a, à accompagner les meilleures stratégies de recouvrer la paix. Ne donnons pas la chance à l’ennemi de déstabiliser le pays. Nous devons éviter de tomber dans les stratégies communicationnelles de l’ennemi », prévient Carly Nzanzu.
Stéphie MUKINZI