Un total de 50 organisations de la société civile congolaise et internationales ont invité, ce jeudi 29 avril 2021, le nouveau Gouvernement dirigé par Jean-Michel Sama Lukonde à actionner la Justice pour des cas des crimes graves récents ou passés, commis en République Démocratique du Congo (RDC).
En effet, ces dernières demandent au Gouvernement de définir une « stratégie claire » pour que les personnes soupçonnées d’être pénalement responsables de graves violations des droits humains soient amenées à rendre des comptes.
Dans cette optique, elles rappellent au Gouvernement de l’Union Sacrée de la Nation de mettre sur table des crimes récents ou passés, en l’occurrence ceux cités dans le Rapport Mapping de l’ONU rendu public en 2010 et dont l’application n’est toujours pas au rendez-vous.
« Le nouveau Gouvernement du Président Felix Tshisekedi, dirigé par le Premier Ministre Sama Lukonde, a une opportunité historique de s’attaquer aux crimes graves, passés ou récents, commis en violation des normes du droit international, notamment ceux décrits dans le Rapport Mapping des Nations Unies publié en 2010. Le Gouvernement devrait rendre Justice et accorder des réparations aux victimes et à leurs familles et mener à bien l’assainissement (vetting) et les réformes du secteur de la sécurité attendues depuis si longtemps », ont-elles écrit.
Ces organisations signataires ont exhorté le Président Tshisekedi et le Premier Ministre Sama Lukonde à s’engager publiquement à faire de la lutte contre l’impunité une priorité absolue et à fournir rapidement une feuille de route pour la Justice transitionnelle qui devrait inclure la mise en place :
• D’un mécanisme judiciaire international ou d’un mécanisme à forte composante internationale pour enquêter sur, et poursuivre, les graves crimes internationaux commis en RD Congo, notamment ceux documentés dans le Rapport Mapping de l’ONU, couvrant les crimes commis entre 1993 et 2003, et d’autres plus récents, que les auteurs des crimes soient congolais ou étrangers. Le mécanisme judiciaire devrait, au moins dans un premier temps, être composé de personnel international et congolais. Cela pourrait aider à développer des capacités et une expertise spécialisées au sein du personnel judiciaire congolais et contribuer à renforcer le système judiciaire au niveau national. Cela pourrait également aider à protéger le mécanisme contre les interférences politiques, militaires et économiques dans le cadre des affaires sensibles. Ce mécanisme devrait respecter les normes internationales et disposer de ressources financières, matérielles et humaines suffisantes pour mener à bien son mandat. En outre, il devrait garantir la participation des victimes aux procédures et permettre aux communautés affectées d’accéder facilement aux informations ayant trait à son travail ;
• D’un mécanisme d’assainissement (vetting) permettant d’identifier et de démettre provisoirement de leurs fonctions les agents des forces de sécurité et d’autres responsables de l’exécutif susceptibles d’avoir été impliqués dans de graves violations des droits humains, le temps que leurs dossiers soient traités. Ce mécanisme d’assainissement devrait tenir compte des rapports du Groupe d’experts des Nations Unies sur la RD Congo, du Bureau conjoint des Nations Unies pour les droits de l’homme (BCNUDH), du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies et des organisations congolaises et internationales de défense des droits humains. Il devrait également aller de pair avec un programme solide de désarmement, de démobilisation et de réintégration (DDR) des anciens combattants des groupes armés, afin de séparer les personnes accusées de crimes graves de celles qui sont immédiatement éligibles à la démobilisation et à la réintégration. Les personnes accusées de crimes graves devraient faire l’objet d’une enquête équitable et, s’il existe suffisamment de preuves recevables, être poursuivies en justice.
• D’un programme complet de réparations pour les victimes de crimes internationaux graves et leurs familles, notamment les victimes et les survivantes de violences sexuelles et basées sur le genre, conformément au droit international, afin de les aider à reconstruire leur vie. Ce programme devrait permettre de réparer les préjudices subis sous forme de restitution, d’indemnisation, de réadaptation, satisfaction et garanties de non-répétition.
À en croire ces organisations, environs 120 groupes armés continuent de s’en prendre aux civils dans les régions de l’Est de la RDC, parmi lesquels plusieurs groupes qui se sont rendus responsables de massacres à grande échelle et d’autres exactions graves.
Les troupes gouvernementales ont également joué un rôle majeur dans les violences récentes, des officiers présumés coupables d’exactions occupant toujours des postes de haut niveau dans la chaîne de commandement. Les récentes atrocités et violences à grande échelle ont également causé d’immenses souffrances ailleurs dans le pays, notamment dans la région du Kasaï, dans le centre, et dans le territoire de Yumbi, à l’ouest, et tous ces crimes, à quelques exceptions près, restent impunis.
Politico a exploité plusieurs extraits du rapport Mapping qui met en lumière les rôles joués par certains responsables de l’époque, à savoir Gabriel Kyungu, James Kabarebe, Yerodia Abdulaye, Banwisho, etc. Sur ce même site internet www.politico.cd, sur sa barre de recherche interne, tapez « Spécial Mapping » et vous retrouvez tous ces articles.
Dominique Malala