Dans ce rapport explosif, plusieurs hauts dirigeants des services de renseignements, de l’armée et même de la police sont directement et nommément pointés du doigt par cette organisation internationale de défense de libertés individuelles et des droits de l’homme.
Human Right Watch affirme que des membres de la Garde républicaine – y compris certaines unités de la Garde républicaine déployées en uniformes de police – étaient responsables, pour l’essentiel, de la force excessive utilisée pendant les manifestations, tirant sur les manifestants à balles réelles et attaquant au moins trois sièges de partis d’opposition.
« L’ordre a été donné de réprimer les manifestants afin de les faire échouer dans leur mission », a expliqué un des officiers. « L’ordre reçu était de tout faire pour les empêcher d’entrer dans la Gombe [le quartier de la capitale où la plupart des édifices gouvernementaux, la présidence et les ambassades sont situés]. » Un autre a indiqué que les ordres étaient d’« écraser » les manifestations. Le 16 septembre, des primes ont été versées aux soldats de la Garde républicaine, aux militaires et aux policiers qui seraient déployés à Kinshasa pendant la semaine du 19 septembre afin de les motiver à assurer une réponse forte pendant les manifestations, a raconté un responsable de la sécurité.
Plusieurs officiers ont indiqué que le général Gabriel Amisi, commandant de l’armée pour la première zone de défense, qui inclut Kinshasa et d’autres provinces occidentales, et le général Ilunga Kampete, commandant de la Garde républicaine, ont dirigé un centre de commandement des opérations à Kinshasa pendant la semaine du 19 septembre et ont donné des ordres aux unités des forces de sécurité sur le terrain qui menaient la répression. Les officiers ont également dit que le colonel Ferdinand Ilunga Luyolo, commandant de la Légion nationale d’intervention (LENI) de la Police nationale congolaise, a donné des ordres aux troupes de la Garde républicaine qui étaient déployées en uniformes de policiers et armées de fusils d’assaut et de grenades pendant la répression.
« Nous portions des vêtements spéciaux pour pouvoir nous repérer les uns les autres, et nous avons incité les manifestants à attaquer les bureaux des partis de la coalition au pouvoir », a-t-il raconté. « Les manifestants étaient vraiment en colère contre les personnes au pouvoir, ils se sont laissés manipuler sans s’en rendre compte. Nous les avons aussi amenés à attaquer les bus publics et d’autres bâtiments associés au parti au pouvoir. »
Lors d’un entretien téléphonique avec Human Rights Watch, Kambayi a déclaré que ces allégations étaient des « rumeurs sans fondement » et qu’il n’avait aucun lien officiel avec la ligue des jeunes du parti au pouvoir.
Un membre de la ligue des jeunes associée au Vita Club, une équipe de football dont le président est le général de l’armée Gabriel Amisi Kumba, a expliqué à Human Rights Watch qu’il avait aussi été appelé à se rendre à une réunion préalable aux manifestations, avec le général Amisi et plusieurs dizaines de membres de la ligue des jeunes. « Nous avons reçu pour instruction de provoquer des troubles parmi les manifestants et de les inciter à endommager des biens », a précisé ce membre de la ligue des jeunes. « Cela serait ensuite reproché aux organisateurs des manifestations. Un de nos membres a été reconnu par les manifestants et a été gravement passé à tabac parce qu’ils ont compris qu’il était un infiltré. » Human Rights Watch a contacté Amisi à propos de cette allégation, mais n’a pas obtenu de réponse.
Deux officiers de la sécurité et des services de renseignements congolais ont expliqué à Human Rights Watch que des responsables du parti au pouvoir et des officiers des forces de sécurité avaient recruté des membres des ligues de jeunes et des combattants démobilisés pour perturber les manifestations. « Ils étaient là pour infiltrer les manifestations et les faire exploser [en violences] depuis l’intérieur », a décrit l’un d’eux. « Ils devaient déclencher les troubles, ce qui entraînerait une réaction des manifestants, justifiant ainsi la réponse policière. »
Ce rapport, dont l’intégralité peut être consultée ici, arrive au moment où les autorités congolaises ont déployé l’armée et la police dans le rue de Kinshasa, alors qu’aucun accord n’a été trouvé durant les négociations entre le Pouvoir et l’Opposition pour le départ du président Kabila à l’issu de son mandat qui prend fin le 19 décembre.
La communauté internationale et les organisations de défense des droits de l’homme redoute les violences dans la capitale congolaise, où l’opposition à toujours promis de descendre dans les rues.