Des tueries se sont multipliées depuis le début de la semaine passée dans la ville de Beni, où des morts sont signalés sous le silence des autorités tant au niveau local, provincial et national.
En effet, au moins 20 personnes ont été tuées à l’aide d’armes blanches et à feu dimanche 24 mars dans le quartier Sayo, situé dans la ville de Beni au Nord-Kivu. Ces personnes ont été tuées selon la société civile de Beni, après les informations fournies par le chef dudit quartier, par les ADF.
Maître Pépin Kavotha soutient que pour le moment, la situation reste confuse en dépit de la présence des éléments FARDC.
« Jusqu’à ce moment, nous sommes en train de dénombrer au-moins 20 personnes tuées par les ADF. Le chef de quartier a confirmé que ce sont les ADF qui sont en train de donner la mort à la population civile », a-t-il fait savoir tout en déplorant le « silence » des autorités.
Il estime que la question des ADF doit être prise au même niveau que celle du M23-RDF qui préoccupe le gouvernement.
« Cette situation doit préoccuper les autorités. L’armée doit bien faire son travail. Lorsque la population fuit cette entité qui était considérée comme grenier, la ville de Beni a le risque d’être dépourvue des produits de premières nécessité. Je suis en train de croire qu’apparemment la population de la ville et du territoire de Beni a été oubliée au profit du territoire de Rutshuru. La concentration de force est vraiment dans le petit Nord », déplore maître Pépin Kavotha.
Le doute sur l’identité de l’ennemi
Alors que le chef du quartier Sayo affirme que les auteurs des dernières tueries sont les terroristes ADF, certains civils sont ceux qui ne partagent pas cette thèse.
Selon un rescapé sauvé de justesse dans les mains de ces assaillants, ces terroristes animés par l’esprit d’occuper les champs de la population, se font passer pour pour les ADF pour cacher leur identité.
« C’est un groupe de gens qui veut occuper nos champs au nom des ADF. Où sont partis les gens qui disent venir ici à Sayo pour garder la population? », s’est interrogé ce rescapé.
L’opposition de son côté condamne le « laxisme et la léthargie » des autorités face à cette menace. Maître Ghislain Syausya, cadre d’Ensemble pour la République estime que cette situation démontre à quel niveau les services de sécurité sont défaillants dans la prévention ainsi que la répression.
« La population n’a pas encore senti un déploiement des militaires à Sayo en dépit de ce drame pour pourchasser l’ennemi signalé dans la contrée depuis deux semaines. J’ai comme l’impression que les autorités sont préoccupées par autre chose. Nous devons mettre la pression sur les services de sécurité », a-t-il déclaré.
Pour mettre terme à cette situation, cet acteur politique encourage la population, particulièrement les jeunes de se constituer en groupe de vigilance pour appuyer les services de sécurité dans la recherche de la paix.
« La population doit se constituer en groupe de vigilance en faisant une patrouille concertée avec les services de sécurité pour mener des patrouilles mixtes avec les services de sécurité. Mais penser que les jeunes seront en train de se constituer en groupe pour aller ramasser les corps au lieu de se constituer en groupe de vigilance pour protéger les vies humaines, est une peine perdue. Nous devons nous unir pour protéger les vies humaines. Nous avons été incompris par la population, mais ce régime est en train de démontrer ses limites. Nous condamnons cette léthargie, la population est malheureusement sacrifiée par des gens à qui elle a voté », s’étonne cet acteur politique de l’opposition.
Face à cette virulence des ADF, l’organisation non gouvernementale, dénommée « Forum de Paix » appelle à la fédération des forces pour en finir une fois pour toute avec les ADF. Elle déplore cependant que les capacités mises en jeu contre l’ennemi ne sont pas proportionnelles à la menace.
« Les autorités contribuent oui mais de quelle manière? On alerte aujourd’hui et la réponse vient après une semaine. On alerte peut-être cet avant midi, mais le renfort vient les après-midi. Les remèdes à porter sont disproportionnés à la dimension de la menace. Ces deux choses distinctes qu’il faut considérer avec sérieux pour prétendre que réellement nous sommes engagés à éradiquer un phénomène. Parce que si le phénomène a déjà lui-même maîtrisé le système pour le combattre alors il est fort probable que l’autre camp de l’ennemi peut avoir déjà aussi monter d’autres stratégies », a déclaré Maître Justin Matete son coordonnateur.
Toutefois, l’armée a indiqué par le biais de son porte-parole que l’ennemi est poursuivi en profondeur. Le capitaine Anthony Mwalushayi a appelé la population à ne pas céder à la panique. Ce dernier l’encourage plutôt à collaborer avec les services de sécurité tout en veillant sur la vigilance.
Devenus virulents, les ADF ont multiplié leurs attaques contre la population civile dans le territoire comme la ville de Beni. Mis à part le fait qu’ils mènent leurs opérations dans le sang, ces derniers enlèvent aussi la population civile.
A Sayo l’identité de l’ennemi suscite des doutes quant aux faits précédents. Certaines sources contactées dans la zone ont révélé que peu avant ces tueries, un groupe des jeunes qui se réclament « Wazalendo » avait déjà installé une position dans la région avec l’objectif de protéger la population.
En désaccord, l’armée était obligée de les déloger de cette entité peu avant que ces drames ne se produisent. Cette situation est à la base du déplacement de la population du quartier Sayo vers le centre ville de Beni craignant pour leur sécurité.