Il y a exactement 24 ans, jour pour jour, depuis qu’une guerre dévastatrice éclatait en plein centre ville, vastement peuplé, de Kisangani, dans la Province Orientale démembrée. Le 5 juin 2000, alors que la population vaquait tranquillement à ses activités journalières, qui à l’école ou à la faculté, qui au marché, qui dans les bureaux, les coups de canon et des bombes ont brutalement troublé la quiétude populaire, semant la panique dans toute la ville aux environs de 9h45.
Au cœur de la ville de Kisangani, l’armée rwandaise affrontait le contingent ougandais. C’était le début d’une guerre urbaine qui allait durer six jours, du 5 au 10 juin 2000, et faire de nombreuses victimes civiles et d’immenses dégâts matériels. Les deux armées n’en étaient pas à leur premier forfait à Kisangani. Elles s’étaient battues l’une contre l’autre par deux fois dans cette capitale provinciale : la guerre de 3 jours, du 12 au 14 août 1999, et celle d’un jour, le 5 mai 2000. Elles se disputaient le contrôle de cette ville importante sur le plan tant stratégique et politique qu’économique et symbolique.
Il a fallu attendre plusieurs années, soit le 9 février 2022, pour voir la cour internationale de justice (CIJ) condamner l’Ouganda pour les dommages causés aux personnes, aux biens et aux ressources naturelles lors de l’intervention militaire de l’Ouganda en RDC entre 1998 et 2003, notamment pour les crimes commis à Kisangani.
24 ans après, la rue gronde justice
En mémoire à ces affres inoubliables, des mouvements citoyens et les organisations de la société civile dont celle des femmes leaders de la Tshopo ont paradé la rue ce lundi 10 juin 2024, banderoles rouges enroulées sur la tête et portant des messages au monde entier. Point de chute, le cimetière de la guerre de six jours.
« Nous réclamons que la justice soit faite pour cette ville et à toutes les victimes. Kisangani a été détruit et mérite mieux », a lancé un manifestant, arborant un t-shirt de LUCHA, un mouvement qui milite pour le Changement en RDC.
« Nous marchons aujourd’hui pour faire attendre nos voix. Nous crions haut et fort pour que justice soit faite », a ajouté un autre manifestant.
Un tribunal pénal international réclamé
Dans un mémorandum qui a été lu devant le public, à cette même circonstance, les mouvements citoyens et les organisations de la société civile ont réitéré leur demande de la mise en place d’un tribunal pénal international afin de juger tous les crimes commis et identifier dans un document appelé le Rapport de Mapping.
Tout droit, au Président de la République, ils lui demandent de : « saisir formellement l’ONU pour demander la création d’un Tribunal pénal international afin d’organiser des poursuites à l’endroit des auteurs des crimes commis en RDC et de rendre publique la liste de tous les auteurs présumés des crimes inventoriés; D’accélérer la mise en place des mécanismes de justice transitionnelle enfin de mettre fin à l’impunité et surtout sceller la réconciliation entre les victimes et leurs bourreaux ».
Dans la même foulée, ces mouvements citoyens ont demandé à Félix Tshisekedi de mettre en place un mécanisme de vérification des antécédents criminels (vetting) pour bannir de la fonction publique civile et militaire à vie les auteurs présumés des crimes graves et d’instruire le Conseil Supérieur de la Magistrature d’appliquer scrupuleusement le droit surtout en ce qui est des différents crimes commis sur tout le territoire national.
Au Gouvernement de la République, ils demandent : D’appliquer rigoureusement le vetting; D’accélérer le processus de l’indemnisation des victimes par le FRIVAO et ceci dans la transparence totale, Réaliser un audit international sur la gestion financière de FRIVAO, De mettre à la disposition des institutions judiciaires des moyens conséquents pour la poursuite des présumés criminels et ceci pour mettre un terme à l’impunité qui semble devenir la règle dans notre pays; D’assurer la reconstruction de la ville de Kisangani conformément à une résolution des résolutions adoptées au Dialogue inter congolais de Sun City.
A l’Assemblée Provinciale de la Tshopo : De prendre un édit proclamant la date du 10 juin Journée d’hommage provincial en mémoire de toutes les victimes de différentes guerres de Kisangani; Prévoir dans le budget provincial une ligne pour l’érection d’un mémorial dans la ville de Kisangani pour rappeler aux générations futures les différentes guerres que la ville a connues et ayant causé plusieurs victimes innocentes.
Et au Gouvernement Provincial : De sécuriser le site dénommé Cimetière des victimes de la guerre de 6 jours pour éviter sa spoliation et ceci par un certificat d’enregistrement, De construire un mémorial à Kisangani (commune de Tshopo, la plus touchée par la guerre de six jours) en mémoire de toutes les victimes de différentes guerres de Kisangani.
Notons que, bien avant cette marche populaire, un culte œcuménique a été dit à la cathédrale Notre-Dame du Très Saint Rosaire où la grâce Divine a été implorée afin que les âmes des victimes continuent de reposer en Paix.