Le mercredi dernier, la Cité de l’Union africaine à Kinshasa a accueilli une réunion d’importance capitale. Le Président Félix Tshisekedi a reçu Christian Bosembe, Président du Conseil Supérieur de l’Audiovisuel et de la Communication (CSAC), pour discuter de la salubrité médiatique en République démocratique du Congo (RDC). Au cœur des discussions : la question cruciale de la régulation des contenus en ligne, une préoccupation qui résonne fortement dans un pays où les réseaux sociaux jouent un rôle de plus en plus influent dans l’opinion publique.
L’impact des réseaux sociaux en RDC : une régulation nécessaire
Christian Bosembe n’a pas mâché ses mots en soulignant l’impact négatif croissant des réseaux sociaux sur la société congolaise. Il a exprimé des inquiétudes concernant la dépravation des mœurs et l’acculturation que ces plateformes numériques favorisent. « Nous assistons à une érosion des valeurs traditionnelles et à une popularisation de comportements nuisibles, influencés par des contenus inappropriés circulant sur les réseaux sociaux« , a-t-il déclaré. Selon lui, les réseaux sociaux sont devenus des outils de désinformation et de propagation de contenus préjudiciables, particulièrement chez les jeunes.
Pour répondre à ces défis, un plan de régulation des médias sociaux et traditionnels a été présenté à Félix Tshisekedi. Ce plan vise à encadrer plus strictement la qualité de l’information diffusée sur les plateformes numériques, tout en garantissant l’équilibre entre la liberté de la presse et la protection des citoyens contre les contenus jugés nuisibles. « Il est de notre responsabilité de préserver les valeurs culturelles de notre nation tout en adaptant notre cadre médiatique aux réalités numériques« , a ajouté Bosembe.
Les défis d’une régulation stricte : un équilibre délicat à trouver
Si la nécessité de réguler les réseaux sociaux semble faire consensus, cette démarche n’est pas sans risque. Dans plusieurs pays, les lois encadrant la régulation du contenu en ligne ont parfois dérivé vers des formes de censure, muselant la liberté d’expression et les médias indépendants. En RDC, où la liberté de la presse demeure fragile, la mise en œuvre d’une régulation stricte doit se faire avec précaution.
« Le danger, c’est que ces mesures de régulation, si elles ne sont pas bien encadrées, pourraient être utilisées pour contrôler la presse et restreindre les voix critiques », avertit un analyste politique local. La RDC, qui est en pleine transition démocratique, pourrait voir ces lois exploitées pour restreindre la diversité des opinions et limiter les débats critiques sur les réseaux sociaux. Les exemples de dérives autoritaires ne manquent pas en Afrique, avec des lois similaires souvent détournées pour censurer les opposants politiques.
De plus, la mise en place d’une surveillance de masse à travers les réseaux sociaux pose un problème de protection des données personnelles. « Nous devons veiller à ce que la régulation des contenus en ligne ne devienne pas un prétexte pour espionner les citoyens ou restreindre les libertés individuelles », souligne un membre de la société civile.
Une régulation à concevoir de manière équilibrée et transparente
Pour que ce plan de régulation soit efficace et légitime, il devra trouver un juste milieu entre sécurité en ligne et liberté d’expression. Une des solutions à proposer par Christian Bosembe est la création d’une autorité de régulation indépendante, chargée de veiller à la transparence des décisions de censure ou de suppression de contenu. Cette autorité serait composée de représentants du gouvernement, des médias, et de la société civile, garantissant ainsi un contrôle démocratique.
Par ailleurs, les géants des réseaux sociaux, tels que Facebook et Twitter, devront être des partenaires actifs dans cette régulation.
Vers une régulation qui préserve la liberté d’expression
Les défis posés par la régulation des contenus en ligne en RDC sont complexes. D’un côté, la nécessité de protéger la société congolaise contre les dérives des réseaux sociaux est évidente. De l’autre, il existe un risque de glissement vers un régime de censure, qui pourrait étouffer la liberté de la presse et des citoyens.
La régulation des contenus en ligne est un sujet crucial pour l’avenir des médias et de la démocratie en RDC. Si la nécessité d’encadrer les plateformes numériques est indiscutable, le défi réside dans la mise en place d’une régulation juste et transparente, qui protège à la fois les citoyens et la liberté d’expression.