La nuit vient de tomber à Kinshasa, capitale de la République démocratique du Congo où certains ne verront peut-être pas la rue demain, le 31 décembre. A Lingwala, commune délicate située non loin du centre-ville — Jouxtant la commune de la Gombe — on se prépare à s’enfermer chez soi, du moins pour les prochaines vingt-quatre heures.
« Nous avons acheté ce qu’il faut. Vue que tout sera fermé demain », explique une dame qui refuse de nous communiquer son nom. Comme elle, plusieurs ici se préparent aussi à se cloisonner, en attendant « ce que va donner cette marche ».
L’opposition est prête
La marche du 31 décembre, annoncée la semaine dernière par les Laïcs, est devenue un véritable enjeu politique entre l’opposition et le pouvoir. Ce samedi, le Gouverneur de la ville, André Kimbuta, a annoncé son refus à cette manifestation, en fournissant plusieurs raisons.
Sans être une surprise, cette décision n’a pas pour autant découragé les organisateurs, qui affirment désormais « être prêts ». « Nous sommes prêts, nous avons bien planifié les choses et nous sommes prêts à défendre pacifiquement la démocratie et la liberté du peuple congolais« , explique un député de l’opposition.
Il parle sous l’anonymat, comme tous ceux que l’on croise le long de cette avenue de Libération (ex-24 novembre). Des jeunes, pour la plupart, et qui auraient aimé célébrer le nouvel an, affirment ne pas savoir ce qu’ils vont faire demain. « On va regarder, mais ça serait prudent de rester à la maison parce que ces voleurs [il pointe un policier] vont trouver toute sorte de raisons pour nous arrêter et nous dépouiller« , explique Junior*.
D’autres, plus engagés, espèrent « quelque chose ». « Demain, Kabibi va chanter la ville est belle« , lance un autre plus créatif à l’endroit du président Kabila, qu’il prête désormais le rôle de l’artiste Papa Wemba dans très célèbre film « La vie est belle ».
Les policiers justement, commencent à se rendre de plus en plus visibles, en début de soirée. Des sources concordantes, un important déploiement est prévu tout au long de la nuit. « Ne sortez pas la nuit, il y a un quadrillage de la ville à partir de certaines heures », nous alerte une source policière sous le sceau de l’anonymat.
Le Pouvoir aussi
Si donc l’opposition est prête, le Pouvoir aussi, que l’on accuse de « préparer la violence ». « Il y a des signaux très inquiétants, notamment du côté des services de renseignements et les forces de Kabila qui projettent de semer la confusion durant cette marche pourtant pacifique« , expliquait un cadre du Rassemblement joint au téléphone par POLITICO.CD.
Dans un article publié le 28 décembre, le média belge révèlent que les autorités de l’ANR prépareraient des mécanismes pour créer de la violence durant cette manifestation. Ce jeudi, explique l’article, les réunions se sont succédées pour tenter de trouver la parade. « Les Kabilistes vont annoncer que cette marche cachait en réalité une tentative de coup d’Etat », affirme-t-on, citant une source diplomatique.
« Ils vont annoncer très prochainement l’arrestation d’un militaire du nom de Malamba, qui serait le bras armé des prêtres. Il va soi-disant passer aux aveux et dénoncer tous les prêtres qui sont les moteurs de cette marche », poursuit-on.
Du côté du pouvoir, on ne veut pas accorder « du crédit aux bruits de couloir ». Le gouverneur André Kimbuta a fait savoir que la Ville de Kinshasa n’était pas capable d’encadrer la manifestation, fournissant un certain nombre des raisons.