Après la participation de Félix Tshisekedi à la cérémonie d’investiture de son homologue Yoweri Museveni, les médias ougandais avaient rapporté que le Président congolais avait émis le vœu de voir les militaires ougandais être déployés dans la partie Est de la RDC. De même source, POLITICO.CD apprend que les Forces de défense du peuple ougandais (UPDF) ont commencé à mettre en place une base militaire avant un déploiement militaire majeur dans l’Est de la République Démocratique du Congo. « L’Ouganda prévoit de déployer des milliers de soldats au Nord et au Sud Kivu pour faciliter la construction de routes en RDC pour soutenir le commerce régional, la sécurité stratégique et l’industrialisation de l’Est du Congo », renseigne le média ougandais chimpreports.com.
Ce média indique que « des sources bien placées ont déclaré que l’opération militaire au Congo était supervisée par le président Museveni lui-même et son homologue, Félix Tshisekedi ».
Parmi les principaux dirigeants de l’armée ougandaise qui vont superviser ces opérations il y a notamment le général Salim Saleh, le chef des forces de défense le général David Muhoozi et le commandant des forces spéciales, le lieutenant général Muhoozi Kainerugaba. Le commandant au sol est l’adjoint des CDF, le lieutenant général Wilson Mbadi.
Un plan commencé « dès 2019 »
À en croire ChimpReports, le plan de déploiement en RDC a commencé dès 2019 lorsque Mbadi a rencontré le commandant de la force de la MONUSCO, le lieutenant-général Elias Rodrigues Martins Filho au ministère de la Défense à Mbuya. Le duo a accepté de maximiser l’utilisation de la cellule de fusion conjointe du renseignement dans le cadre de l’arrangement de la CIRGL basée dans le district de Kasese, pour soutenir les opérations contre les forces démocratiques alliées (ADF) dans l’est de la RDC.
« Le partage du renseignement contre les forces négatives en RDC est crucial, nous devrions utiliser la cellule de fusion à Kasese pour soutenir vos opérations et mettre fin aux souffrances de notre peuple qui leur sont infligées par les ADF », a déclaré le Général Mbadi, cité par ChimpReports.
Construction des routes dans l’Est : 250 millions USD à la clé
La construction et la modernisation de la route nationale du tronçon Kasindi (frontière) à Beni (80 km) et l’intégration de l’axe Beni-Butembo (54 km) à la route nationale débutent cette année. Une autre route de Bunagana dans le district sud-ouest de Kisoro en passant par Rutshuru jusqu’à Goma (89 km) sera également construite, facilitant le transport des marchandises de l’Ouganda vers la RDC.
ChimpReports révèle que la principale raison pour laquelle le général Saleh a campé dans les districts de l’ouest, y compris Kasese, était « d’aider à coordonner le déploiement prévu de l’UPDF en RDC. Il est également entendu que Dott Services, qui a remporté un contrat de 250 millions de dollars pour la construction de routes en RDC, a acheté des véhicules blindés pour les entrepreneurs ».
Le Cabinet a approuvé l’année dernière un plan ambitieux de construction d’un réseau routier de 223 km reliant la frontière ougandaise au territoire de la RDC afin de stimuler le commerce bilatéral et de s’attaquer également à la sécurité stratégique du pays.
Selon une étude du Bureau ougandais des statistiques, certains des problèmes majeurs rencontrés par les commerçants lorsqu’ils participent au commerce transfrontalier comprennent la corruption forcée, les embuscades et le vol, la confiscation ou la perte de marchandises au profit des agents des frontières et l’emprisonnement ou la détention.
L’axe Beni-Butembo, où les nouvelles routes seront construites, est connu sous le nom de « triangle de la mort » pour fournir un refuge aux militants, en particulier au mouvement rebelle ougandais, les Forces démocratiques alliées (ADF). Ces dernières années, les ADF ont intensifié leurs activités militaires près de la frontière ougandaise, tuant des civils et des soldats de la paix de l’ONU.
Tshisekedi « en étroite collaboration avec l’Ouganda »
ChimpReports souligne que le Président Tshisekedi, dont le gouvernement a mené depuis l’année dernière une opération militaire prolongée contre les rebelles des ADF, a accepté de travailler en étroite collaboration avec l’Ouganda et d’autres pays de la région pour résoudre le problème des forces négatives et d’autres groupes armés dans l’est de la RDC.
Dans ce que les responsables ougandais qualifient d’opération militaire « la plus fondamentale » de l’UPDF au cours de la dernière décennie, les forces armées ougandaises travailleront en étroite collaboration avec les troupes de la RDC et une autre force soutenue par l’Union européenne.
L’instauration de l’état de siège dans les provinces de l’Ituri et du Nord-Kivu va permettre à la force conjointe de stabilisation de mener efficacement des opérations contre les mouvements rebelles et les milices qui font des ravages dans la région riche en minéraux pour mettre l’est de la RDC sur une nouvelle voie vers l’industrialisation et le développement. Dans une allocution télévisée, Tshisekedi a déclaré cette semaine qu’il répondait aux « cris sans fin de notre peuple, à l’agonie de nos mères, sœurs et filles dans les provinces provoquées par la soif de sang de mouvements armés impitoyables ».
« Le Parlement pas officiellement informé »
En RDC, le Parlement censé être au courant de cette démarche, « n’est pas officiellement informé ». La révélation a été faite le 13 mai par le député national et membre de la commission Défense et sécurité de l’Assemblée nationale Juvenal Munobo. Pour lui, avant toute sollicitation d’une armée étrangère par la RDC, le Parlement doit être « au préalable informé ».
Juvenal Munubo pense que la venue des troupes ougandaises en RDC, n’est pas une « bonne option ». Il justifie sa position par les méandres de la guerre de 6 jours à Kisangani.
« Nul n’ignore le passé le plus récent lors du passage des troupes ougandaises en RDC, au côté du Mouvement de libération du Congo (MLC). Et lors de la guerre de 6 jours de Kisangani, en 2000, lorsque les troupes des UPDF (l’armée ougandaise) et les RDF (l’armée rwandaise) s’étaient affrontées dans la province Orential, avec comme toile de fond, les intérêts économiques », avait-t-il souligné.
Cet élu de Walikale veut savoir « depuis quand l’Ouganda s’est converti véritablement à un ami de la RDC ». Juvenanl Munubo dit ne pas savoir « si la conversion s’est faite à quelle époque. Que ce soit de Kampala ou de Kigali, tous ont des visées économiques sur la RDC ». Et se demande : « est-ce important de les faire venir une fois encore en RDC ? ».
Pour ce qui est de la traque des groupes rebelles dans la partie Est du pays, le député Juvénal Munubo propose l’échange des renseignements avec les voisins de la RDC plutôt qu’un corps expeditionnel encore dans le pays : « il y a lieu de coopérer avec nos voisins sur le plan sécuritaire, en se limitant uniquement sur l’échange des renseignements. Ils ont des renseignements, par exemple sur les ADF, ils nous les partager ».
Juvenal Munubo exhorte l’État congolais que les accords bilatéraux, supposés aider le pays à combattre les groupes armes, ne soient pas seulement motivés par l’arrivée d’un corps expeditionnel étranger en RDC, comme si on a encore une mémoire courte.