L’actuel gouvernement dirigé par le Premier ministre Sama Lukonde est annoncé « démissionnaire » par plusieurs sources politiciennes à Kinshasa. Et ce même si, du côté du président Félix Tshisekedi, rien n’est certain. Néanmoins, la situation a le mérite de voir les candidats à ce remaniement hypothétique manœuvrer pour entrer au gouvernement, dans un pays où « devenir ministre et mourir », est le principal slogan des hommes politiques.
Ainsi doc, si pour certains, le lobbying auprès des autorités morales se fait en coulisses dans l’immense secret, un cas attire les projecteurs : celui du ministre de la Communication et des médias, Patrick Muyaya. Depuis plusieurs mois, ce jeune ministre est cible d’une véritable campagne tantôt sur les réseaux sociaux, ou encore à travers des événements étranges autour des structures sous sa tutelle. C’est ainsi que Kinshasa a été interloquée de voir une scène surréaliste au siège de la Télévision nationale, avec des agents qui sont allés jusqu’à briser la ceinture de sécurité du président Félix Tshisekedi dans l’idée prétendue de pouvoir lui adresser un mémorandum sur leur situation salariale. « Loin de là, il s’agit d’un acte politique qui visait à décrédibiliser le Ministre aux yeux du Président de la République », explique une source au sein du gouvernement.
Aucune enquête ne pourra déceler le vrai du faux en RDC. Toutefois, quelques semaines seulement après ce forfait, d’autres événements s’ajoutent. Et l’identité des challengers qui joueraient des tours à Patrick Muyaya commence à se révéler. Il sied de rappeler que le Ministère congolais de la Communication et des médias a été longtemps considéré comme la chasse gardée de l’incontournable et ancien ministre Lambert Mende. Pendant près d’une décennie, l’homme a incarné le visage du régime de Joseph Kabila au prix des sanctions internationales contre sa personne. Et très étrangement, l’un de ses « fils spirituel », en la personne l’homme politique Thierry Monsenempwo, est donné comme successeur probable de Patrick Muyaya en cas de remaniement. « Lambert Mende considère que le ministère des médias lui appartient. Il est notamment à la base de la nomination d’un nombre incroyables de personnes qui sont souvent absents du travail, rien qu’au niveau de la RTNC et qui sont les princiaux instigateurs de cette fausse fronde contre Patrick Muyaya », révèle un haut cadre de la RTNC qui a requis l’anonymat.
Thierry Monsenepwo est président de la ligue des jeunes de la Convention des congolais unis (CCU), le parti de Lambert Mende. Kabilistes farouches, les deux et leur parti ont pourtant été parmi les premiers à abandonner l’ancien président Joseph Kabila pour déclarer leur flamme à Félix Tshisekedi. Cependant, ce soutien n’était pas sans intérêt. Lambert Mende a été nommé président du conseil d’administration des Lignes Maritimes Congolaises en juin dernier. « Et il (Mende) entend donc logiquement placer son pion à la tête du Ministère de la Communication et des médias », explique notre source. Et dans cette campagne où tous les moyens sont bons, apprend-on de nos sources, Monsenepwo n’hésite pas à prétendre qu’il aurait le soutien du président Félix Tshisekedi lui-même.
En effet, profitant d’une rencontre privée à la Cité de l’Union Africaine (Bureau du président Tshisekedi) à Kinshasa, Thierry Monsenepwo a rencontré le Chef de l’Etat congolais, sollicitant une photo souvenir. Toutefois, juste à l’issue de cette rencontre, plusieurs journaux ont tiré que ce dernier aurait eu un entretien dans un cadre politique avec le président Tshisekedi. « Cet événement a fortement agacé le Président et toute la Présidence. N’oublions pas que nous faisons face à des gens qui ont incarné le visage de la répression dans ce pays », commente une source à la présidence congolaise. « Il tente d’embarquer le Président et même ses proches dans ses folles ambitions et ça risque de mal se terminer pour lui » ajoute notre source.
Patrick Muyaya voit d’autres alliés s’ajouter du côté de la doublette Mende- Monsenepwo. Lui qui a misé son passage à la tête du ministère de la Communication et des médias autour du slogan « Changement du narratif », a eu la mauvaise idée d’appeler à des changements radicaux notamment à la RTNC, la radiotélévision publique, sous sa tutelle. Toute à coup, toute une floppée de vieux cadres de cette chaîne rejoignent ainsi la campagne contre ce changement. « C’est une chaîne où beaucoup ont été nommés pour toucher des avantages, alors qu’ils travaillaient ailleurs. Dès le moment où le ministre Muyaya a décidé de changer les choses, toute une Ndrangheta s’est levée contre lui », témoigne un cadre de la RTNC.