Tout est parti d’un courrier adressé au président Félix Tshisekedi et intercepté par les services de son Directeur de cabinet, qui le jugeaient alors « suspect ». Les événements ont lieu le 12 novembre dernier à la Cité de l’Union Africaine, bureau du président congolais, à Kinshasa. « Il s’agit d’une enveloppe, format A4, de coloration jaune pâle contenant une lettre d’une page et un journal », confirme une source à la présidence congolaise à POLITICO.CD et qui a requis l’anonymat.
Un rapport de la Direction Technique et Scientifique de la Police congolaise confirme les événements. Selon ce rapport, consulté en partie par POLITICO.CD, une équipe composée notamment d’un Expert Forensic et d’un Expert de scène de crime a été dépêchée le même jour dans les bureaux de Guylain Nyembo, Directeur du cabinet du président Félix Tshisekedi, où elle a récupéré le « courrier » pour analyses. « L’enveloppe destinée au Chef de l’Etat supportait des traces d’altérations, avec des trous aux alentours », renseigne ce rapport.
Toujours selon le même rapport, à l’intérieur du journal qui accompagnait la lettre, « une odeur d’un composé organique [a été observée] ». La lettre et le journal ont par la suite été soumis à un examen approfondi pour déterminer la nature de l’odeur. « Les prélèvements ont été effectués et envoyés au laboratoire Forensic pour déterminer l’analyse de ce composé », précise le rapport de la Police congolaise.
Deux sources au sein de la Direction Technique et Scientifique de la Police congolaise ont confirmé à POLITICO.CD que les résultats des analyses ont établi la présence avérée de la composée chimique de « l’ion cyanure ». Selon une fiche toxicologique publiée par l’Institut français de recherche et de sécurité (INRS) et consultée par POLITICO.CD, l’ion cyanure est un poison qui bloque la respiration cellulaire. « Présent dans certains fruits, le cyanure est un poison particulièrement efficace pour donner la mort. Seulement 200 mg de cyanure de potassium versés dans un verre de boisson suffisent pour tuer en moins d’une minute », explique nos sources à la Direction Technique et Scientifique de la Police congolaise.
Selon le rapport de la Police congolaise, le courrier destiné au Président Félix Tshisekedi provenait d’une « Organisation internationale basée en France ». POLITICO.CD n’a pas été en mesure, pour l’instant, d’identifier l’organisation en question. « Nous sommes au courant de cette affaire que nous prenons très au sérieux », confirme un officiel du gouvernement congolais, joint au téléphone par POLITICO.CD. « Nous savons exactement d’où est venu ce courrier. A l’heure actuelle, nous avons officiellement saisi nos partenaires Français, du fait de nos beaux rapports, pour tirer cette affaire au clair », ajoute cet officiel. POLITICO.CD a appris que le Ministre congolais des Affaires étrangères, Christophe Lutundula, avait convoqué l’Ambassadeur de France en RDC, Bruno Aubert, pour des entretiens autour de cette affaire.
Cette affaire arrive dans un contexte tendu de la crise sécuritaire dans l’Est de la République démocratique du Congo. Dans un message à la nation diffusé par la télévision nationale le 3 novembre 2022, le président Félix Tshisekedi a appelé « la jeunesse » de son pays à « s’organiser en groupes de vigilance » face à la rébellion du M23, soutenue et équipée par le Rwanda, à en croire le gouvernement congolais, l’organisation internationale Human Rights Watch, les Etats-Unis et un Groupe d’Experts des Nations-Unis.