A l’orée des élections générales prévues en décembre 2023, l’épée de Damoclès est toujours suspendue sur la tête du candidat déclaré à la présidentielle, l’opposant Moïse Katumbi. L’affaire des mercenaires le mettant en cause semble désormais loin de livrer son dernier verdict, sept ans après avoir « éclatée » au grand jour.
Dans une correspondance adressée le mois dernier au procureur près la Cour de cassation, l’ancien conseiller spécial intérimaire de Félix Tshisekedi en matière de sécurité, Jean-Claude Bukasa a approché le procureur général, pour s’enquérir de l’état actuel des différentes affaires judiciaires mettant en cause Moïse Katumbi.
« Il vous souviendra que le Parquet Général de la République de l’époque, aujourd’hui Parquet Général près la Cour de Cassation, avait inculpé monsieur Moïse Katumbi pour [atteinte à la sûreté intérieure et extérieure de l’Etat] et l’avait placé sous le coup d’un mandat d’arrêt provisoire avant que le Procureur Général de la République ne l’autorise à se rendre en Afrique du Sud pour les soins médicaux », écrivait le désormais ex-conseiller du Chef de l’État, dans sa lettre adressée au procureur général près la Cour de cassation.
Jean-Claude Bukasa a, dans ce document consulté par POLITICO.CD, rappelé que ces différentes poursuites judiciaires contre l’ancien gouverneur de la province du Katanga portaient principalement sur les accusations de « recrutement des mercenaires étrangers ».
Appuyant les arguments avancés dans sa correspondance, Jean-Claude Bukasa a mis en exergue les affirmations du ministre de la Justice de l’époque, Alexis Thambwe, qui affirmait « avoir la preuve documentée que plus de 400 anciens marines américains et commando sud-africains seraient en situation irrégulière au Katanga depuis novembre 2015 et se faisaient passer pour des agriculteurs à la ferme de Moïse Katumbi ».
L’affaire demeure encore pendante devant Cour de cassation
Faisant suite aux révélations de l’ex-ministre de la Justice, le procureur général de la République de l’époque, Flory Kabange avait officiellement dans sa requête, accusé l’ancien gouverneur du Katanga d’avoir levé ou fait lever des troupes armées, engagé ou enrôlé des soldats et leur avoir fourni des armes et munitions sans ordre ni autorisation du gouvernement, au courant de la période allant de 2014 à 2016.
« À ma connaissance, jusqu’à ce jour, l’affaire demeure encore pendante devant la Cour suprême de Justice devenue aujourd’hui la Cour de cassation », a vivement martelé Jean-Claude Bukasa.
Selon lui, bien que Moïse Katumbi ait été autorisé à regagner le pays dans le cadre de la décrispation politique en 2019. Cependant, cette autorisation « n’absout pas les faits sus-évoqués qui lui sont reprochés ».
Affaire mercenaire, itinéraire d’une longue bataille politico-judiciaire pendant les années Kabila
En mai 2016, soit une année seulement après la rupture de ses relations politiques avec l’ex-Chef de l’État, Joseph Kabila, et quelques mois après avoir officiellement annoncé sa candidature à la présidentielle censée se tenir la même année, Moïse Katumbi faisait déjà l’objet d’au moins trois procédures judiciaires en République démocratique du Congo.
Alors que tout s’apparentait à des suspicions, l’opposant congolais s’est vu finalement être inculpé, le 19 mai 2016, de « recrutement de mercenaires » et a été d’office placé sous un mandat d’arrêt pour des accusations « d’atteinte à la sûreté intérieure et extérieure de l’État congolais ».
Rapidement, une enquête avait été ouverte à la suite de l’arrestation de quatre de ses gardes du corps, parmi lesquels figurait un américain. Moïse Katumbi, pour sa part, se défendait toujours en affirmant « qu’il avait embauché un consultant en sécurité pour renforcer sa protection après avoir reçu des menaces ». Ce consultant était un américain nommé Darryl Lewis, également cité par le gouvernement congolais dans l’affaire des mercenaires.
L’affaire des mercenaires a connu un arrêt partiel lorsque le 20 mai 2016, Moïse Katumbi a été autorisé à quitter la République démocratique du Congo pour aller se faire soigner en Afrique du Sud. Une sortie médicale qui s’est transformée en exil politique de presque trois ans pour l’ex-gouverneur du Katanga.
Le coup de théâtre va finalement se produire en juin 2016, lorsque l’avocat général de la République de la République démocratique du Congo, Victor Mumba, a annoncé la remise aux autorités américaines de Darryl Lewis, ancien militaire des Etats-Unis, arrêté deux mois plus tôt à Lubumbashi et accusé par la suite de « recrutement des mercenaires en faveur de Moïse Katumbi ».
L’affaire des mercenaires était désormais restée « pendante » devant la Cour de cassation jusqu’à la fin du règne de Joseph Kabila, qui s’est achevé officiellement le 24 janvier 2019.