Le départ de la Mission des Nations unies pour la stabilisation en RDC (Monusco) fait désormais couler beaucoup d’ancres et de salives dans l’opinion internationale. Alors que le gouvernement congolais intensifie sa démarche pour obtenir le départ « progressif » de la Monusco, certaines « grandes puissances » restent perplexes quant à la situation sécuritaire du pays après le retrait des forces onusiennes.
Lors de la 9427ème séance du Conseil de sécurité des Nations unies, tenue jeudi 28 septembre au siège de ladite organisation dans la ville américaine, New-York, les Etats-Unis ont ouvertement appelé la communauté internationale à faire en sorte que le départ de la Monusco « ne vienne pas exacerber une crise humanitaire déjà grave ».
Les USA ont proposé au Conseil de sécurité de mettre en place un cadre de concertation avec les autorités congolaises pour « l’efficacité » de la Monusco. En même temps, ils ont insisté sur le fait que « les choses doivent être claires car la mission seule ne peut résoudre le problème de l’insécurité dans l’Est du pays ».
La Suisse, quant à elle, a lors de l’intervention de son représentant au Conseil de sécurité des Nations unies, expliqué que le départ « précipité » des casques bleus pourrait entraîner « des conséquences néfastes pour des milliers des personnes déplacées internes ».
« La présence de la Mission onusienne en République démocratique du Congo constitue le seul rempart aussi faible qu’il soit contre les violences et les abus des groupes armés », a martelé Berne.
Au cours de la 9427ème séance du Conseil de sécurité, le Brésil a également exprimé ses doutes sur le retrait des forces onusiennes. Selon lui, celui-ci peut « créer des vides de sécurité et de luttes de pouvoir engendrant des violences et des atteintes aux droits de l’Homme ».
« Il est illusoire et contre-productif de s’accrocher au maintien de la Monusco »
En République démocratique du Congo, les dénonciations relatives à l’inefficacité des actions sur terrain de la Monusco se sont amplifiées depuis plusieurs mois. Dans son allocution lors de la 78ème Assemblée générale des Nations unies, le Président Felix-Antoine Tshisekedi, a clairement signifié qu’après plus de deux décennies de présence de la Mission onusienne en RDC, il est temps pour le pays de prendre « pleinement son destin en main » afin de devenir le principal acteur de sa propre stabilité.
« Nous sommes reconnaissants pour leur soutien et leur partenariat mais nous sommes également conscients que le retrait progressif de la MONUSCO est une étape nécessaire pour consolider le progrès que nous avons déjà réalisé […] Il est a déploré que les missions du maintien de la paix déployées depuis 25 ans en République démocratique du Congo n’aient pas réussi à faire face aux rebellions et conflits armés qui déchire ce pays, ni la région des Grands Lacs, ni à protéger les populations civiles », s’était indigné le Chef de l’État congolais.
Cependant, la Monusco elle-même affirme régulièrement qu’elle continue de mener « à bien » ses opérations sur terrain. Face à l’inefficacité dont elle est accusée, elle tente souvent de l’expliquer soit par le manque de soutien et collaboration de la part de la population civile, ou encore par l’opposition sur terrain venant de certains groupes armés.
Lors de la présentation du rapport trimestriel sur la situation sécuritaire en RDC, Bintou Keita, représentante spéciale du secrétaire général des Nations unies sur le sol congolais, a laissé entendre que la Mission onusienne a augmenté ses patrouilles conjointes avec les forces armées congolaises afin « de stabiliser la situation sécuritaire dans l’Est du pays ».
Plus loin dans son intervention, tout en accusant les terroristes du M23, du non-respect des résolutions issues de la feuille de route de Luanda, la diplomate onusienne a également fustigé le blocage par le M23 des missions de la Mission des Nations unies en RDC, à Rumangabo, dans le territoire de Rutshuru au Nord-Kivu, pourtant ce dernier était choisi pour servir de site de pré-cantonnement des éléments du M23.
Pourtant, malgré ces yeux doux, Kinshasa ne compte pas laisser les jours de la Monusco s’allonger sur son territoire. À l’ONU, le 20 septembre dernier, Félix-Antoine Tshisekedi déclarait : « Il est donc illusoire et contre-productif de s’accrocher au maintien de la Monusco pour restaurer la paix en République démocratique du Congo et stabiliser celle-ci ».
Selon lui, l’accélération du retrait de la Monusco devient une nécessité impérieuse pour « apaiser les tensions entre cette dernière et nos concitoyens ». Des propos qui ont été également appuyés par Christophe Lutundula, ministre congolais des Affaires étrangères, au cours du 9427ème séance du Conseil de sécurité de l’ONU.