Avril 1994 demeure gravé dans la mémoire collective comme le mois où le Rwanda, cette pépite africaine nichée dans l’écrin verdoyant du continent, fut le théâtre d’une tragédie humaine d’une ampleur inimaginable. Le génocide rwandais, avec son cortège de violence inouïe, a vu le sang inonder les vallonnements du pays, non en murmures étouffés, mais en flots impétueux, emportant avec lui un million d’âmes, Tutsis et Hutus modérés confondus, fauchées dans un déluge de haine ethnique. Le monde, alors soit figé d’horreur, soit drapé d’indifférence, a assisté à cette débâcle humaine, impuissant ou indifférent.
La mission Turquoise, déployée sous l’égide de la France avec la promesse de servir de rempart contre cette furie meurtrière, a navigué en eaux troubles, se débattant avec les limites de son mandat salvateur. Dans le tumulte de cette époque sombre, la mission s’est avérée incapable d’arrêter l’hémorragie, les vies sauvées se comptant en nombre bien inférieur à celui des existences irrémédiablement perdues. Les regrets tardifs et insuffisants de la communauté internationale n’ont fait que souligner l’échec collectif à prévenir cette catastrophe.
Des années plus tard, la République Démocratique du Congo (RDC), voisine du Rwanda, semble payer le prix des remords et des non-dits de la France quant à son rôle lors de ces événements tragiques. Les présidences françaises, de Mitterrand à Macron, se sont heurtées à ce fantôme inextinguible de leur responsabilité morale dans le drame rwandais. Dans une quête ambiguë de rédemption, la France semble offrir sur un plateau d’argent les ambitions expansionnistes de Paul Kagame et de son régime, faisant ainsi peser une lourde hypothèque sur la souveraineté et la stabilité de la RDC.
En effet, l’est de la RDC, richement doté en ressources naturelles, est devenu malgré lui l’arène d’une lutte acharnée pour le pouvoir et le contrôle, orchestrée depuis Kigali. Cette tragédie se joue avec, en toile de fond, une complaisance voire une complicité internationale manifeste, particulièrement remarquée dans l’attitude de la France et de certaines instances européennes. Malgré des preuves accablantes de l’ingérence rwandaise dans le conflit congolais, notamment à travers son appui au groupe armé M23, Paris, dans une démarche équivoque, continue de soutenir financièrement l’armée rwandaise sous couvert de l’Union Européenne, tout en multipliant les gestes de bonne volonté envers Kigali.
Les Congolais ne se laisseront pas faire!
Cette situation paradoxale, où la France se montre prête à déployer ses forces en Ukraine pour défendre l’intégrité territoriale de ce pays, tout en soutenant implicitement le Rwanda dans ses incursions en territoire congolais, soulève des interrogations profondes sur la cohérence et l’éthique de sa politique étrangère. Ce double standard interroge et inquiète, révélant un dangereux jeu géopolitique où la vie et la souveraineté des peuples africains semblent être reléguées au second plan.
Face à cette machination, l’indignation et la résilience du peuple congolais ne faiblissent pas. Conscient de l’enjeu, ce dernier reste fermement attaché à sa souveraineté et à l’intégrité de son territoire, prêt à défendre son héritage contre toute forme de domination ou d’ingérence. La terre du Congo, nourrie par l’esprit de ses ancêtres, le labeur de ses enfants et le sang de ses martyrs, demeure inviolable.
Dans cette lutte pour la vérité et la justice, il est impératif que la voix des Congolais soit entendue et que la communauté internationale, France comprise, prenne acte des souffrances endurées par la RDC et s’engage résolument en faveur d’un avenir fondé sur le respect des droits humains et de l’intégrité territoriale. La mémoire des victimes du génocide rwandais et les épreuves traversées par le peuple congolais doivent inspirer une diplomatie nouvelle, centrée sur la justice et la paix.
La France, ainsi que l’ensemble des acteurs internationaux, se trouvent face à un choix déterminant : reconnaître et agir selon le principe que la stabilité et la paix véritables ne sauraient être atteintes sans une justice équitable et le respect de la souveraineté des nations. La RDC, forte de son peuple courageux, avance vers un avenir prometteur, mais elle ne doit pas marcher seule. Ensemble, faisons face aux ombres du passé avec détermination et espoir, pour que notre héritage soit non pas celui des tragédies, mais celui d’un monde plus juste et fraternel.
LITSANI CHOUKRAN,
Congolais et fier de l’être.