Le Cardinal Fridolin Ambongo a rencontré ce jour le Président Félix Tshisekedi dans un contexte marqué par des tumultes récents sur les réseaux sociaux et une polémique judiciaire. Cette audience, sollicitée par le prélat catholique, visait à clarifier les malentendus et à apaiser les tensions entre les deux figures influentes de la République Démocratique du Congo.
« Dans les tumultes qu’on a entendus sur les réseaux sociaux ces derniers temps, j’avais souhaité rencontrer le Chef de l’Etat. Il m’a donné cette opportunité de le rencontrer aujourd’hui en tant que responsable du pays, le Président de la République et le Cardinal de la RDC, pour que nous puissions faire la lumière sur différents points », a déclaré le Cardinal Ambongo à la sortie de l’audience.
Le prélat a exprimé sa satisfaction à l’issue de la rencontre, soulignant l’importance du dialogue pour dissiper les malentendus. « Cela a été un moment de clarification. Là où les hommes se parlent, les choses sont claires. C’est avec un sentiment de grande satisfaction et de gratitude vis-à-vis du Chef de l’Etat que je sors de ce bureau », a-t-il poursuivi.
Ambongo a minimisé les récents différends, les qualifiant de simples malentendus. « Pour moi, normalement, il n’y a plus de problème. Il y a eu plus de malentendu que de vrai problème. C’était nécessaire qu’on se rencontre pour faire la lumière sur tous ces sujets qui avaient peut-être créé des malaises. Et maintenant qu’on se parle, tout devient clair », a-t-il commenté.
Concernant ses déclarations controversées, le Cardinal a insisté sur le fait qu’elles avaient été mal interprétées. « Je crois que nous nous retrouvons sur un seul point. En tant que Chef de l’Etat, son souci est le bien du peuple congolais. Il s’implique corps et âme pour que ce pays puisse retrouver sa sérénité et sa respectabilité sur la scène internationale. C’est le combat qu’il est en train de mener. De notre part, en tant qu’Eglise, notre souci est aussi le bien de ce même peuple », a-t-il renchéri.
Le Cardinal a conclu en appelant à une collaboration étroite entre l’Eglise et l’Etat pour le bien de la nation. « Nous sommes condamnés à travailler ensemble main dans la main pour le bien-être de ce peuple et pour le bien de notre pays qui est aujourd’hui en péril à cause de la voracité des pays voisins que nous connaissons », a-t-il déclaré.
Cette rencontre marque la première entre les deux personnalités depuis la visite du Pape François à Kinshasa en janvier 2023. Les échanges entre le Président Tshisekedi et le Cardinal Ambongo visent à renforcer la coopération entre l’Eglise catholique et l’Etat congolais, dans un contexte de défis socio-politiques et économiques persistants.
Polémique Judiciaire
Le contexte de cette rencontre est exacerbé par une polémique judiciaire autour du Cardinal Ambongo. Dans une correspondance datée du 27 avril 2024, partagée sur les réseaux sociaux et portant la signature du procureur général près la Cour de cassation de la République démocratique du Congo (RDC), il est ordonné au procureur général près la Cour d’appel de Matete, à Kinshasa, d’ouvrir un dossier judiciaire à l’encontre du Cardinal Fridolin Ambongo Besungu. La même lettre précisait que l’archevêque de Kinshasa n’avait pas répondu à une invitation précédente du 25 avril.
Les faits reprochés au cardinal incluent un « comportement séditieux entraînant des faits infractionnels ». Les prises de parole du prélat sont considérées comme de nature à ne pas encourager les forces armées du pays, qui combattent dans sa partie orientale. C’est ainsi que le procureur général ordonne l’ouverture d’une information judiciaire à charge du cardinal Ambongo.
Suite aux nombreuses réactions provoquées par cette missive, la Conférence épiscopale nationale du Congo (CENCO) a été amenée à faire une mise au point. Dans son communiqué publié lundi 30 avril 2024, la CENCO a reconnu que la Chancellerie de l’archidiocèse de Kinshasa avait reçu une lettre du procureur général près la Cour de cassation, avec une invitation au cardinal Ambongo à se présenter à son office. Cependant, l’épiscopat congolais a précisé que la correspondance est parvenue au moment où l’archevêque de Kinshasa était absent et se trouvait à l’étranger, dans le cadre de sa mission de président du Symposium des conférences épiscopales d’Afrique et Madagascar (SCEAM), entre le 23 et le 26 avril. Le communiqué de la CENCO conclut que l’archevêque n’a donc pas refusé de répondre à l’invitation et n’a pas non plus manqué de considération à l’égard de la justice.
L’épiscopat congolais appelle au calme, « car le dossier est traité de manière responsable avec les autorités compétentes, dans le respect des textes légaux du Pays, y compris l’Accord-cadre entre la RD Congo et le Saint-Siège ».
Les prêtres de Kinshasa ont également adressé un message lundi 30 avril 2024, soulignant que les interventions de leur archevêque sont de nature à affermir les fidèles dans la foi et à éveiller les consciences et non pas à les violenter. Tout en rappelant combien les messages du cardinal Ambongo sont salués par toute personne éprise de justice, de vérité et de paix, ils mettent en garde contre « la diversion », au moment où « la Nation est en danger ». L’Assemblée du clergé kinois conclut son message en appelant également au calme et en priant pour « le Cardinal », « afin que ce temps d’épreuve se transforme en semence de justice, de paix, de réconciliation et de développement durable ».
La rencontre de ce jour entre le Président Tshisekedi et le Cardinal Ambongo pourrait marquer un tournant dans cette polémique, avec l’espoir d’un apaisement des tensions et d’une collaboration renforcée pour le bien du peuple congolais.