Kinshasa, 16 mai 2024 – Félix Tshisekedi a convoqué les députés de sa majorité politique pour taper du poing sur la table. Le président congolais a ordonné la suspension du vote prévu ce samedi pour l’élection du Bureau permanent de l’Assemblée Nationale, la restructuration de la liste des candidats, et a menacé de dissoudre l’Assemblée nationale si nécessaire.
Le vote des membres du bureau de l’Assemblée nationale a été reporté. En sa qualité de Chef de la majorité, le Président Tshisekedi a enjoint les six membres du présidium à se concerter dès ce samedi avec les chefs des regroupements politiques afin de revoir le ticket présenté.
Dans son allocution introductive, Tshisekedi a rappelé les principaux défis qui attendent cette législature, notamment les réponses aux questions sécuritaires, sociales et de l’emploi des jeunes. « Nous devons faire de ces défis nos priorités ; j’appelle à l’éveil de votre conscience collective », a-t-il déclaré.
Au sujet du ticket présenté par le présidium de l’USN pour l’élection des membres du bureau définitif de la Chambre basse du parlement, le Chef de l’État a recommandé que cette liste soit « revue et corrigée », en tenant compte de la représentativité de la Grande Orientale, forte d’une soixantaine d’élus nationaux, ainsi que de la représentativité significative de la femme.
Tenant compte des tensions passées (FCC – CACH), le Président Félix Tshisekedi a averti les députés de sa coalition : « Je n’hésiterai pas à dissoudre l’Assemblée nationale et à renvoyer tout le monde à de nouvelles élections si ces mauvaises pratiques persistent. »
Une coalition minée par des tensions
La République démocratique du Congo traverse une crise politique majeure. Depuis la réélection du président Félix Tshisekedi en décembre et sa prestation de serment en janvier, la RDC n’a toujours pas de gouvernement en fonction. La Première ministre nommée le 1er avril ne peut être confirmée car l’Assemblée nationale n’a pas été mise en place. La cause ? Une bataille acharnée entre Christophe Mboso, président sortant du Bureau d’âge, et Vital Kamerhe, désigné candidat de la coalition au pouvoir pour devenir président de l’Assemblée.
Dans un Palais du Peuple assombri par les luttes d’influence, le Bureau temporaire, dirigé par Mboso, multiplie les accrocs dans une guerre totale contre Kamerhe.
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Tout commence avec Augustin Kabuya et Christophe Mboso. Secrétaire général de l’Union pour la Démocratie et le Progrès Social (UDPS), le parti du président Tshisekedi, Kabuya ambitionnait de devenir 1er vice-président de l’Assemblée nationale, tandis que Mboso voulait conserver sa position à la tête de cette institution. Ensemble, ils formaient un duo prêt à tout pour maintenir leur emprise.
Cependant, Vital Kamerhe, soutenu par une frange importante de députés, se dressait sur leur chemin. Pour renforcer ses soutiens, il forma une nouvelle coalition politique baptisée « Pacte pour un Congo Retrouvé » (PCR), regroupant : Actions des Alliés et UNC (Vital Kamerhe), Alliance des Acteurs Attachés au Peuple (AAAP), Alliance Bloc 50 (A/B50) et Coalition des Démocrates (CODE).
Cette plateforme politique, présentée le 23 janvier lors d’une conférence de presse à Kinshasa, avait pour ambition d’apporter un soutien solide à la majorité parlementaire durant la législature à venir. En réalité, son objectif principal était de soutenir la candidature de Kamerhe à la présidence de l’Assemblée nationale.
Une guerre politique éclate. Face à l’impasse, le président Tshisekedi exige l’organisation de primaires pour départager les candidats. Sentant l’orage arriver, Augustin Kabuya décide de jeter l’éponge, renonçant à sa candidature au poste de 1er vice-président. Mais le secrétaire général de l’UDPS n’est pas encore prêt à s’avouer vaincu. Il continue à manigancer aux côtés de Christophe Mboso et d’un autre acteur clé, Modeste Bahati. Pour Bahati, originaire du Sud-Kivu comme Kamerhe, voir ce dernier prendre la présidence de l’Assemblée signifierait sa fin politique, géopolitique oblige.
Néanmoins, Kamerhe remporte les primaires avec brio. Il est officiellement désigné candidat de la majorité au pouvoir à l’élection du Bureau définitif de l’Assemblée nationale. Cependant, Christophe Mboso et Augustin Kabuya refusent de s’incliner. Dès lors, ils déclenchent une guerre silencieuse. Mboso bloque l’élection du Bureau définitif.
Combines et impasse persistante
Selon des informations exclusives recueillies par POLITICO.CD, le duo Mboso-Kabuya tente de former une nouvelle majorité de députés pour faire voter un candidat surprise contre Kamerhe. Cette manœuvre a poussé une centaine de députés nationaux à lancer une pétition visant à éjecter Christophe Mboso et le Bureau d’âge. Ces élus accusent cette équipe de bloquer l’organisation de l’élection et l’installation du Bureau définitif de l’Assemblée.
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De leur côté, les partisans de Vital Kamerhe ne restent pas passifs. Dans une lettre adressée au gouverneur de Kinshasa, ils annoncent une marche en soutien à la candidature unique de Kamerhe à la présidence de l’Assemblée nationale. La marche, prévue de Lingwala jusqu’au Palais du Peuple, vise à démontrer leur force et à faire pression pour débloquer la situation.
Des querelles internes continuent de troubler l’Union Sacrée en République Démocratique du Congo, surtout autour de la composition et du fonctionnement de la commission chargée des élections du bureau de l’Assemblée nationale. Le député Steve Mbikayi a levé le voile sur une série d’irrégularités qui pourraient entacher la légitimité de ce processus crucial pour la démocratie congolaise.
Un peu plus tôt dans la journée, le président national et l’autorité morale statutaire du regroupement politique AFDC-A, Modeste Bahati, a décidé d’aligner la candidate Polipoli Lunda Chimène, élue de Malemba-Nkulu, en remplacement du candidat Bahati Maygende Serge élu de Kabare.
Ces révélations jettent une lumière crue sur les défis auxquels est confrontée la gouvernance en RDC, où les luttes de pouvoir et les accusations de clientélisme continuent de miner la confiance du public dans ses institutions démocratiques. Les développements futurs indiqueront si l’Assemblée peut surmonter ces divisions internes et avancer vers un processus plus équitable et transparent.