Vital Kamerhe, autrefois un allié de premier plan de l’ancien président Joseph Kabila, a connu une disgrâce soudaine en 2008. Alors président de l’Assemblée nationale, il s’est opposé publiquement à l’accord militaire entre la RDC et le Rwanda, ce qui a conduit à sa démission forcée. Cette période a marqué le début d’une longue traversée du désert pour Kamerhe, où il a dû reconstruire sa carrière politique dans un contexte de méfiance et de marginalisation.
Exclu des cercles de pouvoir, il a été contraint de réévaluer ses alliances politiques et de trouver de nouvelles voies pour revenir sur le devant de la scène. Il a fondé son propre parti, l’Union pour la Nation Congolaise (UNC), et s’est positionné comme une voix de l’opposition, critiquant les dérives autoritaires et la corruption endémique sous le régime Kabila.
Une vie de combats
En 2018, Kamerhe s’est allié à Félix Tshisekedi dans le cadre de l’accord de Nairobi, espérant obtenir le poste de Premier ministre en cas de victoire. Cependant, cet espoir s’est évanoui lorsque Tshisekedi est devenu président. Non seulement Kamerhe n’a pas obtenu le poste promis, mais il a également été arrêté et emprisonné en 2020 dans le cadre de l’affaire des « 100 jours », un programme d’urgence lancé par le président Tshisekedi. Accusé de détournement de fonds publics, il a été condamné à 20 ans de travaux forcés, une sentence qui a été plus tard réduite en appel.
Pendant son incarcération, Kamerhe a maintenu son innocence, dénonçant un complot politique visant à l’écarter du pouvoir. Ses partisans ont organisé de nombreuses manifestations pour réclamer sa libération, affirmant que son arrestation était politiquement motivée. Finalement, après avoir purgé une partie de sa peine, Kamerhe a été libéré en décembre 2021, suite à une révision de son procès et à son acquittement.
Après sa libération, Kamerhe a entamé une restauration politique. En janvier 2022, il a été nommé vice-premier ministre, un poste qui lui a permis de regagner du terrain et de renforcer sa position au sein du paysage politique congolais. Ce retour au premier plan n’a pas été sans controverses. Ses détracteurs ont critiqué sa nomination, affirmant que sa réhabilitation rapide était le résultat de tractations politiques en coulisses. Néanmoins, Kamerhe a utilisé cette opportunité pour montrer qu’il était toujours un acteur clé de la politique congolaise, prêt à jouer un rôle majeur dans les décisions nationales.
Les élections législatives de 2023 ont été marquées par des tensions et des manigances politiques. Kamerhe, candidat à la présidence de l’Assemblée nationale, a dû faire face à de nombreuses machinations. Christophe Mboso, président sortant, et Modeste Bahati, autre poids lourd politique, ont tenté d’instaurer des primaires internes pour affaiblir la candidature de Kamerhe. Malgré ces obstacles, Kamerhe a réussi à maintenir sa candidature.
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De la mort au triomphe
La tentative de coup d’État et d’assassinat dont Kamerhe a été victime la veille de l’élection a ajouté une nouvelle épreuve à sa carrière. Des assaillants ont attaqué sa résidence à Kinshasa, mais il en est sorti indemne grâce à l’intervention rapide des forces de sécurité. Cet incident n’a fait que renforcer sa détermination et celle de ses partisans.
Les circonstances de l’attaque étaient dignes d’un thriller politique. Des hommes armés ont tenté d’envahir le Palais de la Nation après avoir échoué à éliminer Kamerhe. Leur plan, mal exécuté, s’est soldé par un échec retentissant. Cet épisode a mis en lumière les failles sécuritaires du pays et la résilience de Kamerhe face aux tentatives de le neutraliser.
Vital Kamerhe a prouvé à plusieurs reprises sa capacité à surmonter les défis et à rebondir après des épreuves difficiles. Sa carrière, marquée par des périodes de disgrâce, d’incarcération et de luttes politiques, témoigne de sa résilience et de sa détermination à jouer un rôle clé dans l’avenir politique de la RDC. Aujourd’hui, en tant que président de l’Assemblée nationale, Kamerhe se trouve à un nouveau carrefour de sa carrière, prêt à influencer les décisions politiques majeures et à travailler pour la stabilité et le développement de son pays.
Il est cependant attendu au tournant alors que la société socio-économique du pays n’est pas stable, dominée par la crise sécuritaire dans l’Est de la RDC. L’Assemblée nationale, souvent décriée pour ses dépenses, sera au coeur de ce deuxième mandat du président Félix Tshisekedi qui est plus que jamais attendu au tournant. Le Chef de l’Etat congolais n’avait d’ailleurs pas mâché ses mots, menaçant, s’il le faut, de dissoudre l’Assemblée nationale si cette dernière ne venait pas à satisfaire les aspirations des populations.
Vital Kamerhe devra également composé avec un Bureau de l’Assemblée nationale très hostile à sa personne et où chaque délégué, désigné par des leaders de l’Union Sacrée, y est pour son propre agenda. Mais l’homme a une grande expérience, ayant déjà été speaker. C’est sans doute un élément qui a pesé sur sa designation, alors qu’il est largement soutenu par le Président Tshisekedi.