Les violons ne s’accordent toujours pas entre le ministre d’État chargé de la Justice et Garde des Sceaux, Constant Mutamba et les magistrats face à la décision de justice. Au regard de la situation carcérale dégradante à la prison centrale de Makala, la surpopulation notamment la tentative d’évasion des détenus, Constant Mutamba a causé les magistrats de tous les péchés d’Israël qui, selon lui, sont à la base de tous les maux qui rongent aujourd’hui la prison centrale de Makala.
D’après lui, en effet, chaque semaine, les magistrats envoient les détenus à Makala sans tenir compte de la capacité de cantonnement.
Selon Constant Mutamba, il n’y a pas une tentative d’évasion mais plutôt un acte de sabotage des actions du Chef de l’État d’autant plus que de toutes les fois qu’il a désengorgé la prison les magistrats ont envoyé le double. Aussi, il a accusé des magistrats de faire sortir des gens clandestinement.
«Je viens d’atterrir et croyez moi, je règle cette affaire ici dans deux semaines maximum. J’ai alerté, j’ai alerté, tous se sont constitués contre moi. Voilà les résultats ! Ça c’est un sabotage des actions du chef de l’État. Et ça ne se passera pas comme ça. Chaque semaine, les magistrats envoient les détenus ici à Makala sans tenir compte de la capacité de cantonnement. Et ça c’est injuste. Vous venez ici vous faites sortir des gens clandestinement, ça c’est un acte de sabotage, ce n’est pas l’évasion. De toutes les fois, moi j’ai désengorgé, ils ont envoyé le double. Depuis que j’ai commencé combien de détenus ont été envoyés ici après désengorgement ? C’est cela qu’on saura l’acte de sabotage d’où il est parti», a déclaré le ministre d’État de la Justice avant de laisser entendre qu’il va «sérieusement» sanctionner.
Rejet des responsabilités sur les magistrats
Pas plus loin que ce mercredi 4 septembre, le Conseil supérieur de la magistrature a rejeté tout en bloc les accusations portées contre les magistrats selon lesquelles ils sont responsables de la tentative d’évasion qui a eu lieu dans la nuit du 1er septembre au 2 septembre sous prétexte qu’ils transfèrent à grande pompe les détenus à Makala qui, du reste, a abondé la prison.
Selon le CSM, l’augmentation de la population carcérale est fonction de l’évolution démographique dans la ville de Kinshasa qui, au moment de la construction de ce centre pénitentiaire de 1500 personnes en 1957, ne comptait que 250 000 habitants. Aujourd’hui, dit-il, la ville en compte plus de 15 millions d’habitants.
À en croire le président du CSM, Dieudonné Kamuleta, la solution de cette surpopulation à la prison centrale de Makala ne viendra qu’à la construction de nouvelles prisons et maisons d’arrêt et à l’application stricte de la loi sur la détention ainsi que celle sur le régime pénitentiaire.
Mutamba accusé d’«une ingérence inquiétante»
Le Syndicat des Magistrats du Congo (SYMCO) avait dénoncé ce qu’il appelle «une ingérence inquiétante» de Constant Mutamba, ministre d’État, ministre de la Justice et Garde des Sceaux, dans le fonctionnement du pouvoir judiciaire.
Dans un communiqué du 19 août, le SYMCO avait souligné une série d’actes du ministre qui, selon eux, menacent l’indépendance de la justice et enfreignent les dispositions constitutionnelles du pays.
Ces magistrats avaient accusé Constant Mutamba de s’immiscer de manière intempestive dans les affaires judiciaires, «une violation flagrante» de la Constitution du pays qui garantit l’indépendance du pouvoir judiciaire.
Parmi les actes dénoncés, figure l’instauration d’un « tribunal populaire » au sein du Palais de Justice, où, dit le syndicat, le ministre a pris des décisions à l’encontre des justiciables, parfois même en ordonnant des arrestations et en s’opposant aux décisions de la Cour de Cassation.
Outre les actions judiciaires «controversées», le SYMCO avait fustigé les déclarations publiques du ministre, qu’il qualifie «d’outrageantes et désobligeantes» à l’encontre du corps des magistrats. Selon le syndicat, ces propos visent à jeter l’opprobre sur les magistrats, les rendant responsables de la «maladie» qui gangrène le système judiciaire. Ses discours, toujours, selon le SYMCO, exposent les magistrats à des dangers accrus, y compris des agressions et des assassinats.
Christian Okende