Le 10 janvier 2019, le dauphin de Joseph Kabila, Emmanuel Ramazani Shadary arrive troisième à l’élection présidentielle avec 23,8%. Le jet privé, les billets de banque à gogo, l’appui des gouverneurs dans chaque province où il tenait son meeting, les dispositions sécuritaires…, bref, les moyens de l’État mis à sa disposition, n’ont pas servi à grand chose. « ERS13 » a perdu la bataille.
Il venait là de payer le prix du bilan de 18 ans de gouvernance de son mentor Joseph Kabila, jugé largement en deçà de la moyenne par les congolais. Mais cette défaite, Ramazani Shadary l’accueillera avec sportivité, fair-play ; avec un « sourire chinois » aux lèvres qui cache mal sa peine de regarder le tapis rouge de loin pendant 5 ans supplémentaires, alors qu’il voulait bien le piétiner pendant ce quinquennat d’alternance.
Pour lui, il n’y aura ni contestation de la victoire de Félix Tshisekedi dans les médias, ni de recours à la Cour constitutionnelle. Le « bon perdant » sera même présent à la cérémonie d’investiture de son adversaire, brandissant les deux doigts victorieux de l’UDPS, lorsque Félix Tshisekedi encense sa candidature dans son discours d’investiture. L’homme s’avoue vaincu.
Cependant, au-delà des apparences, Emmanuel prend soin de remettre sa casquette de Secrétaire permanent du Parti du Peuple pour la Reconstruction et la Démocratie, PPRD, afin de se réinventer au lieu de disparaître sur la scène politique congolaise.
La « remontada »
A l’aube de la victoire de Félix Tshisekedi, beaucoup de congolais qui se sont réjouis de » la fin » du régime Kabila se désillusionnent. Le FCC tient l’Assemblée nationale, les assemblées provinciales, le sénat, les gouverneurs et le gouvernement national. Or le FCC, c’est le « PPRD d’abord » et « les alliés ensuite ».
Le dit « stratège coup sur coup » Emmanuel Ramazani Shadary va présenter à ses militants, coup sur coup, les membres du PPRD élus, élevés aux postes de responsabilité de l’État congolais, tels des trophées remportés après une lutte longue et populaire.
Mardi 2 mars, malgré sa défaite à la présidentielle, Ramazani Shadary ne perd pas la face devant ses militants. Il rassure que rien n’a changé. Le PPRD reste ce grand parti de la RDC. La preuve, le parti de Joseph Kabila compte 116 députés nationaux sur le minimum de 330 que compte le FCC. L’UDPS et l’UNC réunis peinent à réunir 60 députés nationaux. Le PPRD, c’est aussi 156 députés provinciaux. C’est le début d’une longue série des présentations :
présentation de la présidente de l’Assemblée nationale, Jeannine Mabunda ; présentation du premier ministre, Sylvestre Ilunga Ilunkamba ; présentation de 15 gouverneurs PPRD sur les 26 possibles ; présentation de 43 sénateurs ; présentation de 7 présidents des assemblées provinciaux ; présentation de 16 « camarades » nommés au gouvernement Ilunkamba.
Le message est unique : malgré la défaite de son candidat à la présidentielle, le PPRD reste » la première force politique de la RDC » et Joseph Kabila demeure le « Grand Prêtre » des politiciens congolais.
Uppercuts, Kimono et polémique
Un peu comme il a été le centre émetteur des motions incidentielles du PPRD-MP à l’Assemblée nationale, Emmanuel Ramazani Shadary a suscité des incidents sur la place publique, mettant en mal l’équilibre de la coalition FCC-CACH.
Déjà, lors de la présentation des députés nationaux et provinciaux, le SP fait une mention spéciale au Kasaï pour avoir rapporté 11 élus nationaux au parti. Un message à peine voilé au camp UDPS qui s’est fait battre dans son propre bastion aux législatives. Quand il dévoile finalement son langage : Kabila est grand prêtre ; la présidence détourne l’argent du contribuable congolais ; Félix Tshisekedi a institutionnalisé l’impunité ; UDPS, parti milice ; la gratuité de l’enseignement de base est l’œuvre de Joseph Kabila,…
Dans son premier discours sur l’état de la nation prononcé au parlement réuni en congrès, Félix Tshisekedi a décrété 2020, une année d’actions. Le secrétaire permanent du PPRD Ramazani Shadary quant à lui, attend aborder cette même année en mode « uppercuts politiques ». Avec entre autre, ce contrôle parlementaire initié à l’égard de la ministre des affaires étrangères issue de l’UDPS, Marie Tumba Nzenza, par la sénatrice PPRD Francine Muyumba.